Antonin Mercier aime le kitsch. Le fait-main. Les belles matières. La photographie aussi. Ancienne. Contemporaine… Et les montres, qu’il collectionne depuis gamin. A 30 ans, il entame une reconversion pro, quitte le marché de l’art, et se lance dans l’entrepreneuriat et l’artisanat parisien. C’est aussi simple que LAPS…
D’où viens-tu Antonin ?
Du marché de l’art ! Mon père était commissaire-priseur, j’ai grandi dans le milieu des choses particulières et uniques. Petit, j’étais déjà collectionneur. Mes premières montres ont été des objets anciens dont j’ai continué à faire collection. Je n’ai jamais eu le réflexe de passer la porte d’un magasin, j’étais plutôt coutumier des ventes aux enchères ! Je suivais mon père à Drouot, j’avais accès à ce genre d’objets facilement… Mon oeil s’est fait dans le marché de l’art, j’ai travaillé durant plusieurs années pour la foire d’art contemporain Art Paris, qui se tient au Grand Palais.
Qu’est-ce qui t’a fait quitter ce milieu ?
Arrivé à 30 ans, je me suis posé la question d’une nouvelle orientation professionnelle. J’avais besoin de changement. J’ai commencé à réfléchir à un départ en Inde car j’avais le projet de faire travailler des designers européens avec des savoir-faire indiens. Les Indiens me fascinent car ils sont très forts en artisanat avec un vrai sens de l’esthétisme. En parallèle de ce projet, j’ai commencé à discuter avec un artisan horloger qui réparait mes montres anciennes. Il réalisait des horloges. Je lui ai demandé s’il était capable de réaliser des montres et on a commencé à fabriquer des montres en bois, à l’époque où ce n’était pas encore la mode…
Tu as donc abandonné ton projet de partir en Inde ?
Oui, finalement j’ai laissé de côté mon départ en Inde. J’ai décidé de rester à Paris pour créer LAPS…
On sent que quelque chose t’a retenu…
Oui, la rencontre d’une jeune femme ! (rires)
Tu as donc dû te former au métier d’horloger ?
J’ai commencé par prendre des cours de dessins à l’école Boule. J’ai pu dessiner mon premier boîtier inspiré des lignes Art déco des années 30. J’ai aussi appris les bases de l’horlogerie auprès de cet horloger pour comprendre les mouvements quartz que j’ai choisi pour mes montres.
Tu réalises donc toi-même tes montres dans ton petit atelier parisien ?
Je réalise les cadrans dans mon atelier et la montre est assemblée dans le sud de Paris. A mes débuts, j’ai commencé par une première série de montres avec des photos kitsch, anciennes et contemporaines dans le fond de mes cadrans, je l’ai appelée Signature. Par la suite, j’ai élargi les matières pour utiliser du papier, du cuir ou du bois, sélectionnés en France et retravaillés à la main par mes soins. Je vois chacune de mes montres comme des objets de curiosité uniques. C’est pour cela d’ailleurs qu’elles sont toutes limitées et numérotées.
Ce concept de montres avec des photographies très kitsch dans le fond du cadran est surprenant ! Comment t’est venue l’idée ?
Mon inspiration première, c’est une montre de la campagne de Nixon trouvée sur le ebay américain. Kitschissime. J’ai trouvé l’idée super sympa. Le marché de la montre manquait cruellement de folie à l’époque ! Je voulais du chtarbé, du kitsch au poignet.
Il y a aussi des photographies anciennes. C’est le passionné d’art qui s’exprime dans le choix des photos ?
Le passionné de photographie, oui. Je cherche et trouve mes photos un peu partout : en voyage, à la librairie du congrès américain où l’on peut trouver des tirages incroyables qui ont parfois plus de 150 ans ! Je regarde dans les fonds photographiques qui sont tombés dans le domaine public. Et je fréquente aussi beaucoup les ventes publiques pour y dénicher des photographies anonymes.
Tu travailles beaucoup les matières. Comment les sélectionnes-tu ?
Ce que j’ai découvert en étant entrepreneur, c’est que tu partages et transmets ta passion, c’est très viral. Au début mes fournisseurs me sortaient ce qu’on trouve partout et à force de leur parler de mon projet et de ma passion, ils ont commencé à me sortir des choses du fin fond de leur placard en me disant : “Tiens, ce morceau de chêne tu pourrais peut être en faire quelque chose”. C’est comme cela que je me suis retrouvé avec ce chêne millénaire, une bille de bois trouvée en Meurthe-et-Moselle en 1989 dont il lui restait quelques échantillons. Comme j’ai besoin de tous petits morceaux, même les chutes m’intéressent ! Je peux vous dire que le jour où je tombe sur une planche de l’Olympia, j’en fais une montre ! L’idée d’avoir Mike Jagger qui a foulé le sol de ma montre, ça me fait rêver…
LAPS présente une grande variété de montres avec chacune une histoire bien particulière… C’est important pour toi que chacune soit un conte à elle toute seule ?
Oui. J’aime l’idée de réaliser des objets de curiosité. Je ne me considère non pas comme un horloger mais comme un éditeur de montre. J’ai envie de créer des montres avec des histoires fortes qui pourront témoigner d’une personnalité particulière à celui ou celle qui la portera ! Le rêve est très important dans mes montres. En avoir une en chêne n’a rien d’extraordinaire. Savoir qu’il a poussé à l’époque de Carthage et de Rome, c’est autre chose.
On n’aurait peut-être pu commencer par là mais… Pourquoi la montre ?
Parce que c’est l’objet qu’on montre à qui on a envie… Avant je bossais dans un milieu assez stricte, je m’habillais sobrement. La montre, c’est ce qui se dissimule facilement sous la manche et qui permet toutes les fantaisies.
Antonin, peux-tu nous laisser en tête à tête avec tes montres, on a une ou deux questions à leur poser…
Coucou jolie LAPS, que caches-tu dans ton cadran ?
Nakano Takeko, une Onna-bugeisha, autrement dit une femme combattante. Elle a pris les armes à 21 ans et a fondé sa propre armée de femmes. Elle a mené des combats contre l’empire japonais jusqu’à être touchée à la poitrine. Femme d’honneur, elle a demandé à sa soeur de l’achever et lui couper la tête pour ne pas que ses ennemis utilisent son corps en trophée…
A quel poignet peux-tu être vue ?
Sur le poignet d’une femme active, conquérante et ambitieuse, prête à relever tous les défis du quotidien.
Et toi, qui protèges-tu dans ton cadran ?
La toute première photo de Clyde Barrow prise lors de sa première interpellation dans un commissariat américain à Dallas, alors qu’il n’avait que 15 ans ! Il venait d’être incarcéré pour ne pas avoir rendu une voiture qu’il avait louée. Le gamin était plutôt précoce dans les embrouilles. C’est drôle parce qu’il a une tête d’ange et quand on sait ce qu’il va devenir derrière, c’est presque fascinant…
A quel poignet peux-tu être vue ?
Sur le poignet de ceux qui osent parfois aller au-delà des limites. (Pas trop loin non plus !)
Et toi, de quoi es-tu faite ?
De chêne millénaire. Un fermier était en train de re-planifier son champ quand son tracteur s’est cabré car il avait tapé dans une bille de bois. Elle faisait 1m50 de large. Ce chêne était tombé il y a près de 3000 ans dans un marécage et la boue l’avait entièrement conservé. Il a été daté au carbone 14 par le CNRS à 2550 ans quand il est tombé, il a donc plus de 3000 ans et a vu la fondation de Rome et de Carthage…
A quel poignet peux-tu être vue ?
Au poignet d’un rêveur. De quelqu’un qui a envie de voyager, de se rappeler quand il regarde l’heure, que même s’il prend le métro chaque matin, la vie ne se résume pas simplement au métro-boulot-dodo.
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