Elles ont 23 et 27 ans, elles nous ont filé la chaire de poule l’été dernier après avoir décroché en deux de couple poids légers la médaille d’argent aux Jeux Olympiques de Tokyo : Claire Bové et Laura Tarantola nous ont rencontrées pour une interview énergisante et inspirante pour démarrer l’année ! Rencontre avec un duo à suivre, si on y arrive !
À quand remonte votre passion pour l’aviron ?
Claire – J’ai commencé à 14 ans, au départ pour suivre une amie ! A la base, je ne voulais pas faire d’aviron, car c’est un sport très pratiqué par mes parents et mon frère et j’avais des souvenirs de régates à Versailles auxquelles j’avais dû assister dans la grisaille et le froid, ça m’avait refroidie ! Et puis j’ai commencé à performer dans ce sport et la suite tu la connais !
Laura – J’ai aussi commencé à 14 ans, par hasard ! J’avais touché à pas mal de sports sans trop accrocher. Une copine du collège faisait de l’aviron depuis 2 ans à Grenoble, je l’ai suivie un mercredi aprem pour une séance découverte. Ce n’est pas forcément le sport en lui-même qui m’a plu mais l’ambiance au sein du club. Les filles avaient l’air de s’éclater en compétition, elles me mettaient des étoiles plein les yeux.
On sent lorsque l’on est totalement alignées : le bateau va très vite, on se sent inarrêtables
Comment décririez-vous les sensations qu’offre l’aviron ?
Claire – L’aviron est un sport de fainéant ! (rires) On essaie de faire le moins d’effort pour glisser le plus longtemps possible. Mon moment préféré, c’est la fin de journée, quand le bassin est un miroir, que le soleil se couche, que la lune se reflète dans l’eau et qu’on ne fait plus la différence entre le ciel et la terre. C’est calme, c’est hypnotisant, ça fait lâcher prise. Chaque geste doit être parfait pour ne pas rompre cet équilibre magique qui permet une glisse incroyable, sans accros.
Laura – L’aviron est une histoire de coordination, de connexion entre les rameurs. Avec Claire, on sent lorsque l’on est totalement alignées : ce sont parfois des micro secondes dans le rythme, le bateau va alors très vite, on se sent inarrêtables.
Quand vous ramez à deux, quel est votre placement sur le bateau ?
Laura – Le coach décide avant chaque compétition, car on est placé en fonction de nos points forts. La personne devant doit être hyper régulière, et la personne derrière doit savoir s’adapter à chaque situation. C’est un mix qui doit fonctionner. A chaque fois que l’on concourt ensemble, Claire est devant, et moi derrière, c’est toujours dans ce sens là qu’on va le plus vite.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, vous ne vivez pas de l’aviron. Que faites-vous dans la vie ?
Claire – L’aviron reste effectivement, pour les femmes et les hommes pro, un sport de loisir, de passion. On doit bosser à côté ! Pour ma part, je suis en deuxième année de kinésithérapie à Lyon avec une flexibilité d’emploi du temps.
Laura – Je suis sortie diplômée de l’école de commerce de Grenoble en 2019, via son cursus pour les sportifs et maintenant je travaille à la SNCF avec un aménagement de mes heures de travail pour pouvoir m’entraîner !
Vous avez décroché la médaille d’argent en aviron aux JO, qu’avez-vous ressenti à cet instant ?
Claire – On a mis du temps à réaliser. On a fait beaucoup de travail mental et de visualisation positive pour banaliser la compétition et ne pas se faire envahir par le stress. Et quand on est monté sur le ponton d’honneur, avec la musique derrière, on volait sur notre petit nuage.
Laura – Notre coach était en larmes, ce sont de trop belles émotions. Quand on est sorti du bateau, on s’est sauté dans les bras. On était si fières d’avoir fini deuxième sur un championnat qui rassemble le monde entier avec de grandes nations. Tout s’est aligné, c’était magique. On n’a pas dormi pendant 5 jours ensuite, c’était que du bonheur !
Pour vous, quelle est la force de l’autre ?
Claire – Pour moi, la force de Laura est d’être calme, posée, d’avoir toujours la solution à tout, c’est un pilier. Je peux compter sur elle jusqu’au bout.
Laura – Claire est pour moi la personne qui incarne le mieux le dépassement de soi. Quand tu rames avec elle, tu ne peux qu’être à fond car tu sais qu’elle est en train de tout donner, même quand ça fait mal. Ca m’a fait gagner en sérénité : peu importe le classement à l’arrivée, je sais qu’il n’y a aucun regret à avoir.
Sentez-vous un comportement différent vis-à-vis des filles dans le monde du sport ?
Laura – L’aviron est un sport assez protégé de ces sujets car hommes et femmes sont logés à la même enseigne et l’aviron n’est pas très médiatisé. On n’a jamais eu le sentiment d’avoir des bâtons dans les roues, l’ambiance en club est très saine. Après, c’est vrai qu’il est important de montrer que les femmes performent aussi dans le sport. Beaucoup ont décroché des médailles aux jeux derniers et aucune n’a fait la couverture de l’Équipe : c’est dommage que la médiatisation soit très masculine, même si c’est en train de changer.
Quelle sportive vous inspire ?
Laura – Serena Williams, de par sa longévité, son mental de fou et sa capacité à avoir réussi à concilier vie de famille et performance sportive.
Claire – Ma maman, Christine Liégeois, rameuse d’aviron, dernière médaille en date aux championnats du monde en deux de couple poids légers. Elle m’a transmis sa passion. Quand je discute avec elle et qu’elle me parle de glisse les larmes aux yeux, j’ai aussi envie de ramer pour elle. C’est une histoire de transmission.
Vous partez où pour faire le plein d’air frais ?
Laura – A la montagne ! J’aime randonner, me poser en altitude et me sentir toute petite face à l’immensité qui m’entoure. J’ai l’impression d’être loin du bruit, de la pollution…
Claire – Chez mes grands-parents en Bretagne pour monter à cheval et galoper sur la plage ! C’est l’un de mes plus beaux sentiments de liberté. Je n’ai plus trop l’occasion de faire de l’équitation car il ne faut pas que je prenne le risque de me blesser, mon corps étant mon outil de travail. Mais j’essaie de m’offrir ces moment d’évasion après les championnats ou entre deux saisons.
Votre corps étant votre outil de travail, quelle est votre routine de soin ?
Claire – J’avoue que je fais au plus rapide ! (rires) Ma routine beauté concerne surtout les mains car elles sont très abîmées par les frottements et comme je dois avoir des mains présentables en kinésithérapie, j’essaie d’en prendre soin. Je protège aussi beaucoup la peau du visage car nous sommes sans cesse en extérieur.
Laura – Avant chaque entraînement, on prend le temps de réveiller notre corps. Personnellement je ne suis pas très souple, j’essaie de faire un maximum d’étirements le soir pour aider mon corps à récupérer. Je fais aussi 20 minutes de yoga par jour. La semaine étant très intense, je profite du dimanche soir pour m’offrir un moment cocooning à base de gommage et d’hydratation. J’aime bien me faire un soin pour les cheveux car on est toujours au soleil, et en été, nos cheveux sont complètement grillés si on ne les protège pas !
On vous souhaite quoi pour 2022 ?
Laura – De continuer sur notre lancée et performer ensemble !
Claire – Une dose d’aventure, et pas de blessures.
Série photos réalisée par Lucie Sassiat pour Le Prescripteur.