Réhabiliter les femmes avortées avant 1975 pour reconnaître qu’elles ont été condamnées injustement, c’est l’appel lancé par la Fondation des Femmes qui a partagé en janvier une pétition à signer par toutes et tous ! Leur objectif ? Dans un contexte où 40% des femmes dans le monde vivent dans un pays qui restreint ou interdit leur droit à l’IVG, à l’heure où elles sont 47 000 à mourir parce qu’on leur refuse un avortement sûr, à l’heure enfin où ce droit recule drastiquement aux Etats-Unis, la réhabilitation demandée par la Fondation des Femmes est un geste politique fort, dans la continuité de la constitutionnalisation de mars 2024.
Sur le modèle de la proposition de loi votée par l’Assemblée nationale le 6 mars 2024 visant à reconnaître la responsabilité de la Nation dans les condamnations pour homosexualité entre 1942 et 1982, l’idée est ici de pousser à la création d’une commission indépendante chargée de la reconnaissance et de la réparation, matérielle ou symbolique, des femmes injustement condamnées pour avortement.
Réhabiliter ces femmes avortées, c’est reconnaître qu’elles ont été condamnées injustement. Il s’agit de restaurer leur dignité mais aussi de leur redonner une digne place dans l’Histoire des femmes et de leurs droits.
La fondation des femmes
Jusqu’en 1975 et la loi Veil qui a légalisé l’avortement en France, les femmes ayant recours à l’avortement sont poursuivies, jugées, condamnées ou socialement ostracisées pour avoir pratiqué des avortements en application de l’article 317 du Code pénal de 1810.
[Article 317 du Code pénal de 1810 (abrogé)]
Quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, manoeuvres, violences ou par tout autre moyen aura procuré ou tenté de procurer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte, qu’elle y ait consenti ou non, sera puni d’un emprisonnement d’un an à cinq ans, et d’une amende de 1.800 F à 100.000 F.
Déjà réprimé sous l’ancien régime, d’après les sources judiciaires de l’époque contemporaine, on trouve 1 020 condamnations de femmes avortées entre 1826 et 1880, 715 entre 1881 et 1909. Après la Première Guerre mondiale, dans une France hantée par l’idée de dépopulation, toute femme « qui se serait procurée l’avortement à elle-même » risque de 6 mois à 2 ans de prison, et de 100 à 2 000 Francs d’amende.
Mais c’est surtout pendant le régime de Vichy que la répression s’intensifie : l’avortement redevient un crime passible de peine de mort et les condamnations de femmes avortées sont multipliées par 7 dans la période charnière de 1940-1943. En 1946, 5 151 affaires d’avortements clandestins sont encore jugées par les tribunaux, plus encore que sous Vichy. La condamnation des avortements perdure largement après la Seconde Guerre mondiale jusqu’à l’amnistie de 1974.
50 ans de la loi veil : réhabilitons les femmes condamnées pour avortement
Nous, militantes, chercheuses, élu.es, demandons la réhabilitation des femmes injustement condamnées pour avortement.
A l’heure où l’on vous écrit ces lignes, plus de 8000 personnes ont signé, à la suite d’Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes, la pétition lancée par la Fondation dont de nombreuses personnalités comme Annie Ernaux (écrivaine), Michelle Perrot (historienne), Julie Gayet (actrice), Sarah Durocher (présidente du Planning Familial), Laurence Rossignol (sénatrice), Laura Calamy (actrice), Clémentine Galey (podcasteuse), Hussein Bourgi (sénateur)…
Rendre justice, c’est aussi affirmer un message clair dans un contexte international sombre : l’avortement est une liberté, un droit humain fondamental.
Anne-Cécile Mailfert,
présidente de la fondation des femmes
Signez la pétition « Nous, militantes, chercheuses, élu.es, demandons la réhabilitation des femmes injustement condamnées pour avortement. »
