« L’amour Ouf » de Gilles Lellouche : pas si ouf

J’attendais avec tellement d’impatience de visionner « L’Amour ouf », réalisé par Gilles Lellouche ! Moi qui avais tant aimé son premier long métrage « Le Grand Bain », j’avais, je l’avoue, de grandes attentes pour ce film en compétition officielle. Et bien que la prestation de ses jeunes acteurs, Mallory Wanecque et Malik Frikah est épatante, et la bande son géniale : je ne valide pas du tout le scénario qui tombe dans l’écueil classique d’une histoire d’amour violente (qui donc n’en est pas une).

Mallory Wanecque et Malik Frikah : la vrai tête d’affiche

Ecoutez, je trouve qu’ils volent même la vedette à François Civil et Adèle Exarchopoulos, qui reprennent les rôles à l’âge adulte ! Ils incarnent avec une intensité saisissante les versions adolescentes de Jackie et Clotaire. Leur alchimie à l’écran donne une authenticité touchante à la genèse de cette histoire « d’amour tumultueuse » (nous y reviendrons…).

Coup de coeur pour Alain Chabat, en papa de Jackie

Alain Chabat, dans le rôle du père compréhensif (je veux le même !), livre une prestation tout en nuances, apportant une profondeur émotionnelle supplémentaire au récit.

La bande-son du film : son véritable atout

La bande-son pépite ! Mais peut-être est-ce parce que je suis née dans les années 90. Mêlant des titres emblématiques des années 1980 qui résonnent avec force tout au long de l’intrigue, des morceaux de The Cure et Depeche Mode viennent ponctuer les scènes clés, renforçant l’immersion du spectateur dans l’époque et les émotions des personnages.

L’attitude touchante de Gilles Lellouche

Il le dit lui-même sur la croisette : le réalisateur n’en revient pas d’être sélectionné en compétition officielle aux côtés des plus grands. Reste à savoir comment son film sera accueilli par la critique, car pour ma part : mon avis est tout de même fortement mitigé, voire… tranché.

Illustration Hilaire Baud – Festival de Cannes 2024

Un gros fail scénaristique qui perpétue le sexisme et l’image trompeuse (et dangereuse) de l’amour passion

Cependant, malgré ces qualités indéniables, le scénario de « L’Amour ouf » présente des faiblesses notables. L’intrigue, bien que portée par des acteurs talentueux, s’enlise dans une glorification des relations amoureuses toxiques – je suis fatiguée -, les présentant comme des passions à vivre pleinement. Et quelle nouveauté ? Encore une nana intelligente qui va s’emmouracher du rebel de l’école, « violent mais c’est pas sa faute et avec moi il peut changer ». (Oui, j’avoue, je suis blasée)

Romantiser les comportements destructeurs sans offrir de véritable remise en question ou de perspective critique ? Je dis non. Surtout depuis la lecture très récente de l’essai « Désirer la violence – ce que la pop culture nous invite à aimer » de la journaliste féministe Chloé Thibaud.

Et puis : les femmes ne méritent-elle pas mieux ? Jackie n’a-t-elle pas d’autres alternatives qu’entre Clotaire, le voyou violent, ou Jeffrey (incarné par Vincent Lacoste), son mari possessif, jaloux et… violent qui finit par montrer son véritable visage à la fin du film ? J’ai envie de dire : Jackie, franchement, tu mérites mieux, on mérite mieux.

A ceux qui pourrait me reprocher une certaine « cancel culture », je réponds surtout qu’il serait temps que le cinéma cesse de reproduire des schémas toxiques et glamourisés à outrance pour nous offrir de nouveaux récits qui font bien plus envie (croyez-moi). C’est bon, on a eu notre dose des relations blindés de red flags qui finissent tout de même en (faux) happy end.

En somme, « L’Amour ouf » brille par la qualité de son casting et sa bande-son immersive, mais laisse perplexe par son goût d’ancien monde. Gilles, allez, tu peux tellement faire mieux !

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