Quand on grimpe les escaliers de son immeuble rue du Faubourg Saint-Martin, on est loin de s’imaginer débarquer dans un appartement au charme dingue, transformé en une jungle accueillante peuplée d’assiettes, de tasses, de théières et d’autres curiosités en porcelaine dorées à l’or fin. Bienvenue chez Arnold qui nous ouvre les portes de son Bazar d’Alger.
Pourquoi as-tu baptisé ton atelier “ le Bazar d’Alger “?
Tout simplement parce que je m’appelle Arnold d’Alger ! (rires) Le Bazar représente assez bien ma personnalité et le lieu dans lequel tu te trouves : j’aime toucher à tout, explorer de nouveaux médiums, être en contact avec la matière. Ici, il y a de la vaisselle partout, du carrelage, du papier, des pinceaux, de la soie… C’est vraiment le bazar !
C’est amusant que tu aies pour nom de famille “d’Alger” !
D’après un vieux cousin qui a fait des recherches généalogiques, ce nom nous provient de l’un de nos ancêtres qui a été abandonné, bébé, dans un couvent en Charente en 1830. A l’époque, quand on trouvait un enfant abandonné, on lui donnait le prénom du Saint du jour ou un nom en référence à l’actualité du moment. En 1830, on était en pleine expédition d’Alger et les bonnes sœurs qui l’ont recueilli ont décidé de l’appeler Pierre d’Alger.
Tu dis avoir souhaité renouer avec le fait main. Que reprochais-tu à ton précédent job ?
Pour être honnête, j’en ai eu ras le bal de passer mon temps à pianoter derrière mon ordi. J’avais un job de graphiste et illustrateur freelance, et aussi étonnant que cela puisse paraître, j’avais complètement perdu le contact avec la matière, et je n’étais plus dans un processus de création. Je rentrais du texte dans des cases, je me suis lassé. J’ai commencé à prendre des cours de peinture sur soie et de décors sur porcelaine. Immédiatement, j’ai adoré retoucher des pinceaux, me salir les mains, ça m’avait manqué !
Ta spécialité est de proposer de la vaisselle ancienne sur laquelle tu apposes tes motifs. Pourquoi avoir choisi de peindre à l’or ?
J’ai commencé par peindre en couleur sur de la vieille vaisselle que j’avais dans mes placards et je trouvais frustrant que la peinture s’abîme une fois qu’elle passe au lave-vaisselle. Je voulais proposer un service pratique qui ne nécessite pas d’être lavée à la main ! Je me suis renseigné, et j’ai appris que l’or ne s’abîmait pas en machine, que c’était un mythe ! C’est comme ça que j’en suis venu à peindre en or. Depuis, je suis devenu un chineur compulsif : j’achète des lots de vaisselles sur leboncoin, sur les brocantes… Je ne m’arrête plus.
Parle-nous des motifs iconiques de tes assiettes…
Deux motifs ont beaucoup plu dès mes débuts et sont devenus emblématiques du Bazar d’Alger : les cœurs qui s’envolent et les petites lettres de l’alphabet qui nagent dans le fond de l’assiette, en référence aux nouilles qu’on mangeait dans nos bouillons quand on était petit ! Je fais aussi beaucoup de créations sur mesure.
Comment fonctionne cette technique de peinture à l’or ?
Quand on peint à l’or, on applique une sorte de pâte marron assez vilaine qui s’avère être de l’or dilué dans de la matière. Pour que l’or pénètre dans l’émail des assiettes anciennes, il faut le recuire : c’est ce que l’on appelle le 3ème feu. Donc une fois le motif réalisé sur la pièce en porcelaine de son choix, on la recuit à 800 degrés pour brûler la matière, faire rougir l’émail et faire apparaître l’or.
Tu proposes de rénover jusqu’à 3 fois la vaisselle de tes clients, pourquoi ?
C’est une façon pour moi d’ancrer le Bazar d’Alger dans une démarche durable ! Et cela rassure aussi beaucoup mes clients qui s’inquiètent souvent que l’or s’abîme à la machine. En réalité, il ne s’abîme pas, tant que tu ne le laves pas avec de l’inox ! Or cela peut arriver car quasiment tous nos couverts sont fabriqués dans cette matière.
Quand on rentre chez toi, on est complètement transporté ailleurs. Toutes les œuvres d’art sont de toi ?
C’est ce que j’aime le plus quand les gens découvrent mon atelier. J’aime cultiver cette surprise à l’entrée de mon appartement, qui contraste avec le quartier populaire que j’habite. Quand tu rentres ici, c’est un peu la jungle, avec de la vaisselle, des tableaux et des tentures partout. Beaucoup d’œuvres ne sont pas de moi, car je suis amateur d’art depuis toujours. Je dois avoir 200 tableaux qui attendent d’être encadrés car j’achète et je stocke des feuilles et des feuilles de dessins, peintures, gravure, photos… mais c’est trop petit ici !
Comment se déroulent les ateliers que tu proposes ?
Ils ont lieu ici. Tu peux venir avec ta propre vaisselle si tu en as, sinon je fournis avec le stock que j’ai ici, cela change un tout petit peu le prix de l’atelier ! On confectionne 2 pièces pendant un cours, en papotant autour d’une tasse de thé. Les ateliers s’adressent à tous et c’est surtout un moment de détente durant lequel tu retrouves le contact du pinceau.
Que dirais-tu à quelqu’un qui hésite à s’inscrire à ton atelier, par peur de ne pas savoir dessiner ?
Il ne faut surtout pas imaginer qu’on ne sait pas faire ! Personne n’est né avec un crayon dans les mains. Je dessine depuis longtemps donc ça a l’air facile, mais j’essaye de donner des petits raccourcis, des astuces simples et malines pour réaliser de jolis motifs pendant mes ateliers.
Y a-t-il un projet fou dont tu rêverais de t’occuper ?
Oui, refaire une station de métro parisien ! C’est mon rêve que l’on me confie la tâche d’un projet artistique sur ces petits morceaux de carrelage iconiques.
Tu es au Bon Marché pour les fêtes de fin d’année, que vas-tu y présenter ?
Je vais y présenter de la vaisselle avec mon motif Éclair et poussière d’étoiles, propice aux fêtes de Noël. Et je proposerai surtout de la personnalisation.
Quel est le cadeau que tu souhaiterais trouver sous ton sapin cette année ?
J’adore manger, donc être invité au restaurant, là où les chefs sont hyper inventifs, serait un super cadeau. J’adore aussi les œuvres d’arts, les objets qui ne servent à rien comme ce crabe, derrière toi, que mon copain m’a offert.
Retrouvez son interview dans Le Prescripteur papier – dans le numéro de décembre 2020.
[…] Si vous nous suiviez déjà en décembre, vous avez forcément vu passer notre portrait d’Arno… créateur de Bazar d’Alger. On vous avait présenté son univers fabuleux de vaisselles chinées auxquelles ils donnent une seconde vie en les habillant de motifs peints à l’or. […]