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Gabrielle Vizzavona, Reine du vin !

Pour cette interview à la carte de la rentrée, on a décidé d’innover et de vous présenter celle qui sublime les créations de chefs du monde entier grâce à sa connaissance à la fois encyclopédique et ludique des vins. Diplômée de la Sorbonne et de Normale Sup, Gabrielle Vizzavona est journaliste vins et spiritueux pour Le Figaro depuis 2015, mais aussi chroniqueuse TV et maître de conférences dans les grandes écoles. Si on y ajoute plus de 30 pays viticoles parcourus depuis ses débuts et environ 4000 dégustations par an, son parcours donne littéralement le tournis…

Et pourtant c’est en toute simplicité qu’elle nous a invitées au Pavillon de la Reine, à la découverte de la carte des vins qu’elle a créée pour Anne, le restaurant de l’hôtel parisien dont le volet culinaire a été pensé par Mathieu Pacaud. D’un accord mets-vins à l’autre et en duo avec le talentueux Edouard Chouteau aux fourneaux, Gabrielle nous invite à découvrir le rôle essentiel du vin dans la réussite d’un repas, mais également d’une vie, celle d’une trentenaire épanouie qui sait conjuguer avec liberté le goût du travail acharné et le plaisir d’une après-midi de farniente.

On oublie souvent la texture du vin au profit des arômes, alors qu’elle est déterminante ! La matière du vin en bouche fait apprécier la dentelle d’un champagne millésimé, le velours d’un Saint-Émilion ou le lin d’un Chinon…

ENTRÉE (EN MATIÈRE)

Langoustines mi-cuites au piment d’espelette, émulsion au fromage blanc et zeste de lime en accord avec Château des Estanilles, Cuvée Inverso blanc 2017, AOC Faugères (Languedoc)

Pourquoi ce choix ?

Les plus beaux terroirs Languedociens de Faugères, aux sols schisteux et durs, confèrent à ce vin biologique une minéralité saisissante, une tension inattendue pour un climat ensoleillé et une finesse délicieuse que nous retrouvons aussi dans l’entrée d’Edouard, ma préférée ici. Le vin réplique les notes iodées de la langoustine, sa rondeur évoque celle de l’émulsion et le piment d’Espelette fait ressortir à merveille les arômes du vin. 

Mes racines 

Je suis née à Paris et j’y vis toujours, donc je suis avant tout parisienne. Mais mon nom de famille, Vizzavona, est corse, cela « belle vue » Plusieurs lieux du centre de la Corse sont homonymes, une forêt, un col et un village… J’y vais souvent, plutôt au Nord de l’île, je suis d’ailleurs marraine des vins de Patrimonio cette année. C’est l’autre partie de mon identité, je me retrouve dans le caractère entier et l’amour du terroir corses.

Un souvenir d’enfance 

Tous mes souvenirs d’enfance sont liés aux goûts et aux odeurs ! C’est assez cohérent avec mon activité…Contrairement à mes parents, mes grands-parents cuisinaient beaucoup, j’ai encore en tête des odeurs de pommes de terres sautées, de poulet rôti…Et il y avait toujours du vin à table, notamment à Noël où mon grand-père, qui travaillait dans le vin et qui possédait un vignoble à Bordeaux, allait chercher à la cave les meilleures bouteilles. J’ai le souvenir d’un Sauternes des années 50, son ambre profond et ses arômes explosifs m’ont marqué…

Une rencontre déterminante 

Notre maîtresse de CE2, Madame Michel, qui avait fait faire du vin à toute la classe. Nous avions été choisir les raisins que nous avions foulés avec nos petits pieds avant de suivre la fermentation du jus… Elle partait à la retraite l’année suivante pour s’installer dans un vignoble et reprendre une petite exploitation. Cette rencontre avec le vin, ajoutée à l’influence de mes grands-parents, a été déterminante pour moi.

Une matière préférée (en cuisine ou ailleurs) 

On oublie souvent la texture du vin au profit des arômes, alors qu’elle est déterminante ! La matière du vin en bouche fait apprécier la dentelle d’un champagne millésimé, le velours d’un Saint-Émilion ou le lin d’un Chinon… J’aime cette approche par le toucher; ces métaphores qui décrivent la dégustation autrement et font tout de suite mieux comprendre le vin.

Une ville 

Londres, en dehors de Paris c’est la seule ville où je pourrais habiter, j’y ai d’ailleurs vécu 2 ans et demi ! J’aime son ouverture d’esprit, sa scène gastronomique dynamique, ses parcs, et le cosmopolitisme des londoniens : les gens ne se toisent pas dans la rue, il y a une liberté d’être absolue.

Femme de jour ou de nuit ?

De nuit, éternellement ! Je n’arrive pas à aimer le matin, physiquement comme mentalement ça m’est difficile. Mais j’aime l’atmosphère, le ressenti et les odeurs de la nuit.

 

PLAT (DE RÉSISTANCE) :

Filet de Veau laitue braisée au jus perlé en accord avec Pinot noir d’Alsace V du domaine Muré.

Pourquoi ce choix?

C’est un plat très délicat auquel j’ai choisit d’accorder un vin rouge en finesse plutôt qu’en puissance. Ses notes de baies rouges et de cerise vont valoriser la chair rosée et tendre du veau. La cuvée est produite sur le grand cru Alsacien Vorbourg qui se retranscrit dans le vin par des notes fumées qui rappellent celles de l’accompagnement.

Mon sport

J’en fais énormément, c’est très important pour moi, ça me permet de rester centrée et d’évacuer les tensions. Plus jeune, j’ai pratiqué la danse classique pendant 14 ans, aujourd’hui ça s’est mué en une combinaison d’activités qui m’apportent un mélange nécessaire de discipline et de méditation. Pilates reformer, entraînement de boxe, mais aussi des séances de cardio sur des machines, elliptique, vélo… en regardant des documentaires culinaires, mes voisins de salle doivent me prendre pour une folle !

Mon « classique » (en cuisine ou ailleurs) 

A table, les linguini vongole. En littérature, Les Nourritures Terrestres d’André Gide, que je relis presque chaque année depuis mon enfance. Mon exemplaire est complètement annoté, écorné, abîmé !  Ce livre me réconforte, il est profondément lié à mon identité.

Mon ingrédient (en cuisine ou ailleurs)

En cuisine, je mets un peu partout du piment, du fromage et de l’huile d’olive. Des basiques indispensables. Ailleurs, l’optimisme.

Ma devise

On n’est jamais mieux servi que par soi-même.

Mon héros – Mon héroïne

Je n’ai pas de figure héroïque tutélaire, donc je dirais Bob l’Éponge pour sa candeur et sa capacité rester indéfectible dans l’adversité et à profiter de chaque moment avec intensité !

Mon accomplissement

Je ne crois pas à l’accomplissement comme une fin en soi ; avoir conscience du chemin parcouru est important mais cela doit être un moteur, les accomplissements sont en chantier permanent. Je m’inquièterai le jour où je serai totalement satisfaite !

Mon rêve

J’en ai deux ; l’un, superficiel, aller dans le Sud-Ouest découvrir la côte, faire du surf, et aller dans ces restaurants dont on me parle depuis toujours à Biarritz et San Sebastian. L’autre, à plus long terme, est d’être continuellement heureuse et sereine: un entrainement mental et spirituel qui est le travail d’une vie.

Ma deuxième passion

Je trouve le concept de passion dangereux ; en revanche, tout ce qui concerne la physique quantique et la circulation de l’énergie en général est un domaine auquel je m’intéresse beaucoup et qui concerne directement mes activités professionnelles.

Mon évasion 

A Paris, l’opéra est mon meilleur exutoire. Le sport est partout un moyen d’évasion pour moi. Mais en cas de burnout, une thalasso au bord de l’Atlantique me fait toujours du bien, cette idée d’être au milieu de nulle part, en peignoir, couverte d’algues et de boue… Me rassure et m’apaise beaucoup.

DOUCEURS ET AMERTUMES (DESSERT ET CAFÉ):

Soufflé au chocolat noir grand cru en accord au cocktail « La Reine »

Pourquoi ce choix ?

Contrairement aux idées reçues, le vin s’accorde généralement très mal avec le chocolat: le cacao étant très puissant, il masque les arômes de la plus part des vins secs. Il lui faut donc quelque chose auquel le chocolat puisse confronter sa force: soit un vin fortifié, soit un spiritueux. Ici, j’ai choisi un cocktail qui rend hommage à l’histoire du Pavillon de la Reine, ancrée à l’union d’ Anne d’Autriche et de Louis XVIII. Lui grand défenseur des spiritueux français, et particulièrement du Cognac. Elle, importatrice du cacao en Europe. Le cocktail est un mélange de Cognac, Grand Marnier et bitter de chocolat relevé d’une pointe de citron, servit frappé. Un accord presque indécent!

Ma musique 

La soul et surtout les titres un peu vintage, particulièrement l’époque du label Motown, j’ai d’ailleurs la collection complète des singles sortis par le label.

Mon parfum 

Porter du parfum est incompatible avec mon métier de dégustatrice, car cela perturbe l’odorat. J’ai le nez sensible, je me lasse assez vite des odeurs et je préfère toujours l’odeur de la peau. Je n’en mets que pour les grandes occasions, sans avoir jamais réussi à terminer un flacon ! En hiver, j’aime Spiritueuse Double Vanille de Guerlain et sa note de rhum caractéristique ; en été, je porte Pulp de Byredo, qui évoque une pêche juteuse, fraîche et sensuelle. Je suis également fan des produits pour corps et cheveux Santa Maria Novella, et des bougies « feu de bois ».

Mon rituel beauté 

J’en ai plein, c’est compliqué ! Si je n’avais pas choisi le vin, je me serais sûrement tournée vers les cosmétiques. Ma mère m’a transmis énormément de rituels que je suis scrupuleusement, comme mettre systématiquement de l’écran solaire, protection 50 minimum, pour protéger ma peau claire. Mes essentiels sont l’eau micellaire Bioderma pour le nettoyage de ma peau, et les crèmes hydratantes Sisley et Dermalogica.  J’aime aussi beaucoup les produits Caudalie, c’est une marque à la fois urbaine et végétale dont les valeurs esthétiques et familiales font écho aux miennes. Leur eau de beauté, un must, que je mets depuis l’enfance, mais aussi leurs crèmes pour le visage et leur huile hydratante corps démontrent tous les bienfaits antioxydants des polyphénols du vin. Forcément, cela me parle !

Mon paysage 

Le Sud-Est, et notamment Ramatuelle où je passe mes vacances : ses pins parasols, sa lumière ocre qui a inspiré tant de peintres et les odeurs de garrigue sont uniques! Il y a aussi celui du vignoble de Barolo, dans le Piémont italien, l’un des plus beaux vignobles au monde avec ses collines voilées de brume et le Mont Blanc en arrière-plan, un panorama très inspirant !

Ma nostalgie 

Les mercredis après-midi passés à Montmartre avec Jacqueline, ma grand-mère, quand j’étais enfant, et qui se déroulaient invariablement de la même façon : déjeuner steak-coquillettes (je chipais des morceaux de steak cru avant le repas), puis promenade au Sacré-Cœur où elle m’offrait toujours une figurine en porcelaine, suivie de mon cours de danse classique avec une Russe autoritaire. Aujourd’hui encore, les coquillettes au beurre sont mon plat anti coup de blues, mais je n’ai jamais réussi à retrouver le goût exact de celles de mon enfance.

Mon regret 

J’ai du mal à saisir la notion de regret, je pense qu’il faut assumer ses actes. En revanche, c’est dommage que le fromage soit aussi calorique !

Un vœu 

Réussir à intéresser le plus de gens possible au vin, qu’ils apprennent à mieux le connaître et donc à se connaître.

Pour en savoir plus sur Gabrielle :

Son site : http://www.gabriellevizzavona.com

Son Insta : @gabriellevizzavona

Et pour découvrir « en vrai » sa sélection de vins et passer un merveilleux moment dans un jardin caché parisien : Le Pavillon de la Reine

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