Solaire. C’est le mot qui me vient à la bouche pour décrire Johanne Toledano, cette femme à l’humour mordant qui a plaqué son job de directrice juridique pour se lancer… sur scène ! Un cheminement intérieur à portée universelle qu’elle dévoile dans un spectacle drôle et profond sous les traits d’une certaine Olivia. Un beau témoignage d’écoute de soi qui semble tendre un miroir à chacun d’entre nous… Rencontre.
Olivia, est-ce que c’est un peu toi ?
J’aime retourner la question : est-ce que tu penses que c’est moi et surtout est-ce que tu penses que ça pourrait être toi ? (rires) Effectivement, le spectacle parle de moi, mais aussi de ma co-auteur, de nos proches… De tous ceux qui sont habités par ces questionnements existentiels, qui ont, à un moment donné, décroché avec leur monde intérieur et oublié de s’écouter. Il y a évidemment des résonnances très fortes avec mon parcours personnel.
J’ai senti que ma vie débutait enfin avec le théâtre ! C’est comme un artichaut dont j’aurais enlevé les feuilles pour enfin arriver au cœur.
Cette quête de toi-même, tu l’as amorcée en plaquant ton job de directrice juridique ?
Complètement. Je m’étais lancée dans des études de droit, poussée par mes parents qui souhaitaient que je fasse une carrière sécurisante. J’ai pratiqué en tant que directrice juridique dans une boite américaine pendant 4 ans, j’ai aussi travaillé en ONG, j’ai fait du droit humanitaire et puis il y a 7 ans, j’ai tout arrêté pour reprendre des études artistiques. J’ai senti que ma vie débutait enfin avec le théâtre ! C’est comme un artichaut dont j’aurais enlevé les feuilles pour enfin arriver au cœur.
Tu avais déjà une fibre artistique en toi ?
J’ai toujours fait de la danse et du théâtre. Je faisais des spectacles en famille… Cela coulait dans mes veines depuis tout petite ! Mais cela restait une activité secondaire, une passion. Et puis il y a eu ce chemin intérieur, long et minutieux, jusqu’à ce qu’il prenne toute sa place. J’aime bien l’image de quelqu’un qui frappe à ta porte : au début on frappe doucement et puis si tu ne n’entends pas, on frappe de plus en plus fort jusqu’à défoncer la porte ! C’est ce qui s’est passé chez moi. J’ai beaucoup somatisé, mon corps m’a envoyé des signes à la hauteur du message. Au début c’était des migraines, des petites allergies, de l’eczéma, comme ce qui arrive à Olivia dans le spectacle, puis c’est devenu des gros maux de ventre, des coliques… J’ai développé des pathologies d’origine psychique, ce qui arrive à énormément de personnes aujourd’hui sans qu’elles l’identifient comme telles ! C’est pour cela que mon spectacle est porteur de message pour tous.
La peau, c’est la mise en relation entre le monde intérieur et le monde extérieur. Quand ce qu’il se passe à l’intérieur est en désaccord avec l’extérieur, elle réagit. C’est comme ça que j’ai commencé un long travail sur moi-même.
Tu as donc décidé d’écouter ton corps ?
Exactement. Physiquement j’avais vraiment de l’eczéma, mais au lieu de mettre de la corticoïde sans réfléchir, je me suis posé les bonnes questions : d’où il vient ? La peau, c’est la mise en relation entre le monde intérieur et le monde extérieur. Quand ce qu’il se passe à l’intérieur est en désaccord avec l’extérieur, elle réagit. C’est comme ça que j’ai commencé un long travail sur moi-même.
J’ai un leitmotiv dans la vie : « Le chemin n’a pas de fin, la fin c’est le chemin ! »
Comme Olivia, tu es allée voir des tonnes de spécialistes du bien-être comme une prof de yoga, une énergéticienne ?
Complètement et en cela, le spectacle n’est pas du tout exagéré ! Je suis vraiment allée à la rencontre de toutes ces personnes. J’ai un leitmotiv dans la vie : « Le chemin n’a pas de fin, la fin c’est le chemin ! » Je crois beaucoup que la vie doit être une exploration sans fin de soi, la finalité c’est de faire ce chemin-là. Du coup je suis toujours à la recherche de nouvelles rencontres. J’ai pratiqué beaucoup de thérapeutes, qui m’ont donné des informations sur mon corps, sur mon mental, sur mon psychisme. J’ai fait des rencontres farfelues, c’est vrai ! (rires)
Ta co-auteur a également suivi ce cheminement intérieur ?
Oui, Olivia tient beaucoup de moi mais aussi d’elle ! J’ai rencontré ma co-auteur Audrey Nataf quand j’étais en stage juridique à New York, elle bossait dans la pub. On a fait connaissance lors une soirée sur un roof top. On a tout de suite eu un super feeling, on a parlé de nos vies et on sentait toutes les deux qu’on n’était pas au bon endroit. On avait l’impression d’être sur une autoroute mais que tout se passait à côté. Les années ont passé, on s’est perdu de vue puis on s’est retrouvé 6 ans plus tard, au moment où toutes les deux on lâchait notre job. Elle s’était penchée sur la psychanalyse, moi sur le théâtre et le développement personnel. L’idée de monter un spectacle ensemble sur ce qui nous habitait est devenue une évidence.
Tu ne t’es pas sentie décalée de reprendre les études de théâtre aussi tard ?
Au début, si, mais je pense que c’est ce qui m’a poussée à écrire. Quand j’ai arrêté d’être juriste, j’ai réalisé que je devais absolument me créer mon job, car dans ce métier, il y a de la place pour tout le monde mais il y a beaucoup de monde ! Je me suis donnée les moyens avec une certaine insouciance. Ma première attirance, c’était le cinéma, du coup j’ai écrit et co-écrit des courts métrages. Il y a eu des ratés évidemment, mais j’avais tellement attendu ce moment-là que lorsqu’il est arrivé, je n’avais plus aucune limite !
Je dirais que mon rêve, ce serait d’atteindre l’équanimité, cet alignement parfait entre mon monde intérieur et extérieur.
L’Ego, mon jeu préféré est ton premier seul en scène. Il fallait oser !
C’est vrai que je n’ai pas commencé par le plus simple : première fois sur scène, première fois seule sur scène et en plus, en allant loin dans les révélations et la mise à nue. Mais quel bonheur.
Tu joues ce soir et mardi prochain aux Feux de la Rampe avant une reprise en mai. Chaque soir est différent ?
Toujours. La fois où tu es venue me voir, je me suis mise à faire du moon walk sur scène. La fois d’avant, je me rappelle avoir fait la roue ! Il y a une telle connexion qui se crée avec les personnes qui viennent que je ne maîtrise plus la fin du spectacle, ça part en impro ! J’ai envie d’embrasser tout le monde, de danser… ! C’est un immense bonheur de pouvoir jouer tout de suite dans une salle comme celle-ci.
Ta première attirance était le cinéma, est-ce que tu as des projets en route dans ce sens ?
Oui ! Je vais bientôt démarrer le tournage pour jouer dans le prochain film de Lisa Azuelos ! Mais je ne peux pas en dire plus…
Te reste-t-il un rêve ?
Je ne suis plus trop dans la projection des rêves, je suis très connectée au moment présent. Mais si je peux le formuler ainsi, je dirais que mon rêve, ce serait d’atteindre l’équanimité, cet alignement parfait entre mon monde intérieur et extérieur
Une dernière question qui nous démange… Tes parents ont accepté ton nouveau choix de carrière ?
Il y a eu des moment de conflits avec ma famille, un petit courant d’air on va dire ! Les métiers artistiques font flipper tout le monde. C’est l’insécurité permanente, on sait pas si ça va marcher… Mais ça n’a duré qu’un temps. Ils m’ont toujours donné beaucoup d’amour, je n’ai jamais cessé de me sentir protégée. Et puis aujourd’hui je me suis beaucoup battue pour pouvoir vivre de ce métier, maintenant j’y arrive gentiment. (rires)
Vous venez voir Johanne Toledano avec nous ?