Styliste, créatrice, bloggeuse, globe-trotteuse… À seulement 23 ans, Maria de la Orden conjugue avec succès (et dans un français parfait !) ses différentes passions, sans jamais quitter ses accessoires fun, son sens de l’humour et son accent chantant qui ensoleille la conversation par tous les temps. C’est entre deux averses à Saint-Germain-des-Prés que nous nous sommes retrouvées, et l’entretien est devenu si prenant qu’on a failli oublier de déjeuner ! Rencontre avec une fille à suivre… si on y arrive !
Tu vis et travailles à Paris, et pourtant ta marque est basée à Madrid où tu as grandi. Comment as-tu réussi à développer ton parcours entre ces deux vies ?
Je suis née et j’ai grandi à Madrid, mais j’ai eu envie de partir très vite découvrir un autre pays une fois le lycée terminé. J’avais une passion pour le français, donc Paris s’est imposé tout de suite, et je me suis inscrite à l’université : en droit pour faire plaisir à mes parents, mais aussi pour me garder une « sortie de secours » au cas où la mode, ma vraie passion, ne me mènerait nulle part. J’ai concilié études et stages dans la mode pendant un moment, jusqu’à un voyage en famille au Pérou en mars 2014 qui a été une véritable révélation ; il a déclenché la création de ma marque dès mon retour à Madrid. Ensuite, j’ai continué à travailler à Paris, maintenant pour Who’s Next, tout en développant ma marque à Madrid, et les deux se nourrissent constamment pour me faire avancer.
Les souvenirs de mes voyages passés se mélangeaient avec le choc visuel et esthétique que j’ai eu au Pérou, donc dès le départ je savais que le voyage recommencerait à chaque saison dans mes collections.
Tu a été soutenue par ton entourage ?
Je n’aurais jamais réussi à concilier ces vies parallèles si mes parents ne s’étaient pas impliqués dès le départ dans le projet, puisque ma mère gère la logistique et la production, et mon père l’aspect légal et l’image de la marque depuis Madrid. Nos rôles se complètent et j’ai une totale confiance en eux, le modèle familial me va très bien ! Et à Paris j’ai eu la chance d’être soutenue très tôt par mon copain et par des amis qui travaillent dans la mode. Toutes ces preuves de confiance dès le départ m’ont donné envie d’y aller à fond, donc à force de travail et d’organisation, j’ai l’impression qu’aujourd’hui ma vie est plutôt bien gérée (rires )!
Mau Loa signifie « le voyage perpétuel » en hawaïen. Pourquoi ce nom et comment en es-tu arrivée à créer ta propre marque ?
Le nom n’a effectivement rien à voir avec le voyage au Pérou qui a déclenché cette envie de créer la marque, quoique… Je l’ai trouvé dans un article sur le web par hasard en rentrant, et cette idée de « voyage perpétuel » me semblait correspondre à la fusion des cultures et des artisanats que je voulais opérer avec la marque. Les souvenirs de mes voyages passés se mélangeaient avec le choc visuel et esthétique que j’ai eu au Pérou, donc dès le départ je savais que les influences seraient multiples, et que le voyage recommencerait à chaque saison… D’où ce nom.
Et ensuite, une fois le nom trouvé, comment et en combien de temps as-tu réussi à développer ton projet ?
J’avais déjà en tête de monter quelque chose en rentrant à Madrid, et j’avais rapporté des tissus péruviens que j’avais dénichés là-bas, des pièces uniques pour la plupart. Elles ont permis de créer une toute petite collection, que j’ai vendue en quelques mois à des copines et à des proches, qui m’ont encouragée à continuer. Ensuite, mon compte Instagram et le site de la marque ont été lancés en 2015, et en une année il y avait déjà de bons retours, donc on a poursuivi avec des collections inspirées par le Mexique, le Guatemala, l’Equateur… Au départ c’était un seul pays par collection, et maintenant j’aime mélanger les influences et les pays. La création récente de l’e-shop et les retours des clients comme des acheteurs me poussent à poursuivre dans cette direction.
Tant mieux si notre rapport qualité/prix étonne, car il permet de questionner par ailleurs les marges énormes que beaucoup de marques font sur leurs produits…
Mau Loa propose des produits de qualité à un prix raisonnable pour le marché. Comment réussis-tu à faire cette proposition et y a-t-il un engagement derrière (éco-responsable, conscious, local) ?
L’idée de départ est de proposer des produits locaux de qualité, que nous allons chercher directement dans le pays concerné hors des sentiers battus par les autres marques, pour pouvoir ensuite les acheter puis les vendre au prix le plus juste. Nous ne revendiquons pas d’appellation « conscious », « locale » ou autre, car il n’y a pas de volonté marketing chez Mau Loa. C’est simplement une façon de faire à petite échelle, dans le respect de la chaîne de production d’un bout à l’autre, du producteur au consommateur final. Tant mieux si notre rapport qualité/prix étonne, car il permet de questionner par ailleurs les marges énormes que beaucoup de marques font sur leurs produits… Et je garantis que les nôtres sont minimales, même s’il y en a, bien sûr !
Quelles sont tes inspirations en mode et ailleurs ?
En mode, le belge Dries Van Noten, pour ses imprimés originaux, ses contrastes de couleurs et son élégance ethnique et cool à la fois. Marni est un peu l’équivalent en Italie, une maison qui propose des créations arty et éclectiques avec beaucoup de jeux de couleurs. Et enfin Phoebe Philo chez Céline, pour la sobriété et l’intemporalité de ses looks chic et minimalistes. Ma collection idéale serait un mélange de ces trois-là !
Ailleurs, je peux être inspirée par tout et partout, le contraste entre le vert foncé de cette chaise et le bordeaux de cette table pourrait même me donner des idées (rires).
Plus sérieusement, il n’y a pas que la mode, et heureusement ! Les voyages sont une grande source d’inspiration pour moi, il y a des paysages qui m’ont marquée et qui peuvent initier toute une collection.
Je puise aussi beaucoup dans le vintage, j’aime voyager dans le temps, détecter les tendances qui vont et qui reviennent… Et puis l’art contemporain, les jeux de couleurs, l’abstraction, je suis toujours contente d’aller voir une exposition dès que j’en ai le temps.
Et les inspirations de ta collection printemps-été 2017 ?
C’est un mélange de paysages maritimes espagnols : Tarifa, qui est assez connu et Vejer de la Frontera en Andalousie, un magnifique village blanc à pic sur une colline. D’où les tons bleus et blancs assez sobres.
Les carreaux et l’influence vintage années 60 (le panier en osier, par exemple) viennent de photos de Jackie Kennedy à cette époque.
Tu es très présente sur Instagram. Un ou deux conseils de pro pour une bonne photo?
Ouh là là je ne sais pas si je peux donner des conseils, même si j’adore la photographie, c’est mon copain qui prend la majorité des photos, donc il faudrait plutôt lui demander (grand sourire amoureux, à voir les photos top sur son Insta on comprend pourquoi J) !
Je pense que c’est une question d’interprétation personnelle et de patience, il faut savoir prendre son temps pour trouver le bon angle et ne pas forcément poster tout de suite. J’ai fait cette erreur au début sur Instagram, et maintenant je ne publie plus instantanément, je me laisse un temps de réflexion !
Quelle est ta routine beauté ?
Pour l’instant minimale, et heureusement (rire) ! Mes deux seuls indispensables sont le démaquillant Créaline H2O de Bioderma le soir et la crème hydratante Hydrabio, aussi de Bioderma, le matin. Pour le make-up je vais au plus simple, avec un fond de teint Laroche-Posay, un correcteur Nars, une touche de Terracotta de Guerlain et surtout un bon blush en touche finale, le Bobbi Brown est top ! Je me passe de mascara et de rouge à lèvres, sauf peut-être le baume à lèvres Dior Addict qui est un peu rosé… J’essaie de rester la plus naturelle possible.
Tu travailles pour Who’s Next, le salon des créateurs de demain. Quelles sont les tendances PE 2017 selon toi ?
Pour la silhouette il y a un retour aux années 80, avec les épaules larges, la taille cintrée, les manches bouffantes…En ce qui concerne les couleurs j’ai vu beaucoup de rose, du shocking au pastel, du jaune aussi. Les rayures reviennent beaucoup en motif… Et bien sûr la lingerie portée dessus au lieu de dessous, comme une brassière en dentelle par-dessus un T-shirt, les pyjamas et les peignoirs en soie qui s’invitent dans la rue… Le jeu des contrastes déjà initié la saison dernière continue.
En ce moment, je vise comme destination une petite île éolienne en Sicile, Alicondi, où il n’y a ni Internet, ni transports motorisés… Un lieu de detox parfait pour cet été.
Quels sont tes projets pour cette année ?
Avec Mau Loa je viens de lancer la collection printemps-été 2017 en ligne, qui a été également présentée à l’espace Paper Lab du BHV.
Parallèlement, je continue à développer des relations avec les professionnels du secteur à l’international, auxquels je présente la marque depuis 2 saisons. Les retours sont très encourageants puisque des multimarques au Japon, au Portugal et en Belgique ont répondu présent, ainsi que des sites de vente online en Espagne, donc j’espère que ça va continuer comme ça.
Bien sûr je poursuis chez Who’s Next avec la préparation du prochain salon.
Et puis, sur un angle plus perso, j’ai commencé le stylisme pour des séries de mode d’amis photographes, ça me plaît beaucoup j’aimerais pouvoir poursuivre et me constituer un book sympa pour pouvoir, qui sait ? Contribuer un jour à des magazines print ou online.
Et tes envies de voyage?
Forcément il y en aura toujours ! En ce moment, je vise comme destination une petite île éolienne en Sicile, Alicondi, où il n’y a ni Internet, ni transports motorisés… Un lieu de detox parfait pour cet été, loin des plages bondées.
Et cet hiver j’aimerais partir à deux à la découverte de l’Argentine et d’un endroit très particulier en Bolivie, Salar de Uyuni, un gigantesque marais salant avec des variétés de paysages incroyables… J’en rêve déjà !
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