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Le raphia stylé de Charlotte Woivré

Rencontre avec Charlotte Woivré, une créatrice de chaussures multi-casquettes pour qui la mode se conjugue avec fun ET responsabilité.

Quel a été ton parcours avant de te lancer avec ta propre marque ?

Je suis diplômée de l’Institut Fançais de la Mode et styliste chaussure de formation. Mais mon parcours m’a d’abord orientée vers Shanghai dans un bureau de tendances, puis vers la fourrure, puisque j’ai été chef de produit vison pour un fournisseur de grandes maisons de luxe. Pour quelqu’un qui ne mange pas de viande, c’est un sacré paradoxe, j’avoue que j’avais beaucoup de mal à supporter les visites d’usine…

D’où mon envie aujourd’hui de proposer avec ma marque une alternative plus naturelle et une chaîne de production plus humaine.

Tu travailles également en parallèle sur les Fashion Weeks peux-tu nous en dire plus ?

J’ai plein de boulots différents en fait (rires) ! Le soir, je suis baby-sitter, l’après-midi je travaille sur ma marque mais je fais aussi du conseil auprès d’autres marques sur la mode éthique et durable. Et enfin durant les Fashion Weeks j’assure la coordination du défilé pour certaines marques 48h avant le show. C’est une mission ponctuelle de « gestion de crise » qui me permet également de garder contact avec les acheteurs et la presse, qui ont parfois du mal à comprendre ce que je fais « vraiment » puisque je les vois aussi pour ma marque. Mais pour l’instant je n’envisage d’abandonner aucune de mes activités…

Le raphia est une matière naturelle idéale pour le processus de teinture végétale, il absorbe très bien la couleur.

Quelles sont les particularités du raphia et comment as-tu découvert ce matériau ?

Le raphia est une matière naturelle idéale pour le processus de teinture végétale, il absorbe très bien la couleur. Ce matériau m’a toujours intéressée, je l’avais repéré en vacances au Maroc avec mes parents ; son côté multifonctions et les infinies possibilités de tissage en font un canevas de travail idéal pour imaginer différents produits. Côté chaussures, j’ai souhaité proposer une alternative plus premium aux sandales à semelle plastifiée qu’on pouvait trouver dans les souks. Il fallait également qu’elles puissent s’adapter à la ville comme aux vacances, ce qui est le cas avec les modèles fermés comme Camille, Inès et Joséphine.

Le Maroc s’est rapidement imposé pour la fabrication des chaussures, car le raphia est cultivé et tissé sur place, cela fait sens par rapport à la culture du pays.

Comment se déroule la fabrication au Maroc ?

Le Maroc s’est rapidement imposé pour la fabrication des chaussures, car le raphia est cultivé et tissé sur place, cela fait sens par rapport à la culture du pays.

Je travaille avec deux acteurs au Maroc : un atelier de tissage et une usine de fabrication de chaussures. Dans notre atelier de femmes, nous avons mis en place un système de collecte : elles viennent chercher le raphia et les patrons le matin et rapportent leur ouvrage en fin de journée. Nous leur donnons un salaire quotidien, qui leur permet de gérer au jour le jour leurs dépenses et celles de leur famille. Nous employons plus de 700 femmes à travers le pays, et un système de navette a également été mis en place afin de faciliter leurs aller-retours dans les plus petites villes et villages. Une fois la tige en raphia (partie supérieure de la chaussure) ainsi tissée, l’usine procède à l’assemblage de la chaussure, toujours à la main.

Nous employons plus de 700 femmes à travers le pays, et un système de navette a également été mis en place afin de faciliter leurs aller-retours dans les plus petites villes et villages.

En quoi tes sandales sont-elles « responsables » ? Y a-t-il encore des aspects du processus à améliorer pour aller plus encore dans ce sens ?

Nos sandales se veulent « responsables » car composées de matériaux issus de la nature, le raphia et le cuir. Peut-être qu’on me reprochera de ne pas opter d’emblée pour le cuir vegan, mais pour l’instant ce n’est pas mon combat ; dans un premier temps, j’ai choisi de porter mes efforts sur l’humain et de proposer la rémunération la plus juste possible à une main-d’-œuvre qualifiée dans la région de production des matériaux. Cette démarche éthique et sociale autour du « fait main » demande beaucoup d’efforts face à des géants qui continuent à tirer sur les prix, mais ça me plaît d’avancer là-dessus petit à petit.

Je souhaiterais optimiser deux points : la teinture est végétale sur la moitié de nos coloris réalisée à partir d’écorces d’arbres, de racines, de fougères… L’objectif est qu’on puisse atteindre rapidement les 100%. J’aimerais également trouver des alternatives efficaces à la livraison par avion, mais il est difficile en tant que petit acteur de trouver des solutions ; pour l’instant, j’essaie autant que possible de privilégier les moyens de livraison alternatifs.

Cette démarche éthique et sociale autour du « fait main » demande beaucoup d’efforts face à des géants qui continuent à tirer sur les prix, mais ça me plaît d’avancer là-dessus petit à petit.

Quel est ton moodboard d’inspirations formes et couleurs ?

Je n’ai pas vraiment de moodboard, mais j’ai en tête beaucoup de souvenirs de voyage qui ont imprimé ma rétine avec des couleurs vives et des formes. J’aime particulièrement les paysages cubains, les volumes des maisons et leurs contrastes avec le ciel, le soleil éclatant, la mer turquoise… Et en pratique, forcément les teintes vives sont les plus difficiles à réaliser en teinture végétale (rires) ! Je passe également beaucoup de temps à étudier les tissages et les motifs des étoffes traditionnelles dans les pays que je visite.

Le produit m’apparaît directement, en absorbant les tendances du moment que je croise avec mes propres envies.

Tu es déjà distribuée un peu partout dans le monde, en ligne et en magasins, comment as-tu réussi à conquérir les distributeurs aussi rapidement ?

J’avais d’abord lancé une marque de vêtements en matière naturelle, mais ça n’a pas marché, notamment à cause du positionnement haut-de-gamme choisi et du made in France. J’ai réfléchi à une alternative qualité/prix qui me satisferait et je suis revenue à mes premières amours, la chaussure ! Moda Operandi a flashé dès la première présentation sur les 3 modèles et les a poussés en trunk show, ce qui a donné un gros coup de pouce au carnet de commandes au démarrage, et surtout cela a permis d’être distribuée dans la foulée par une belle sélection dans le monde entier.

Mon but est de pouvoir remplacer, à terme, chaque accessoire de mode par une version en matière naturelle.

Tu proposes déjà une ceinture en raphia, souhaites-tu étendre la marque à d’autres accessoires ?

Oui, les sacs et les chapeaux seront lancés cet hiver comme accessoires en raphia alternatifs aux sandales ouvertes, et des boucles d’oreilles sont en cours d’élaboration pour l’été prochain. A chaque fois j’ai mis en place le même processus de travail artisanal local, pour ces deux produits ce sera à Madagascar. Mon but est de pouvoir remplacer, à terme, chaque accessoire de mode par une version en matière naturelle.

Quel est ton rituel/indispensable beauté ?

Pas grand-chose en fait, ma salle de bains est à peu près déserte, à part une brosse à dents, un dentifrice et une pierre d’alun (rires) ! Je dirais que mes trois indispensables sont mon baume à lèvres, Lucas’ Pawpaw-Ointment, une tuerie naturelle à la papaye venue d’Australie, ma crème pour les mains et ma crème pour le corps(huile d’abricot ou huile d’amande douce), j’hydrate à fond ma peau ! Pour le reste, à l’approche de la trentaine, je suis rentrée dans une phase d’acceptation de soi où sortir sans maquillage, ça me va… Mais bien habillée et chaussée !

Parle-nous de la collection été 2021…

Pour la collection ETE 2021, j’ai privilégié les modèles compensés, que beaucoup de copines m’ont demandé dès l’été dernier. Notre collection s’articule autour d’un modèle phare – l’espadrille en raphia – que nous déclinons sur plusieurs hauteurs et avec plusieurs finitions. On espère que ça sera la prochaine IT-sandale de l’été ! Enfin, s’ajoute à cela quelques projets spéciaux et collabs surprise à suivre prochainement sur notre compte Instagram…

Pour découvrir les chaussures de Charlotte, c’est ici !

Et pour la suivre sur Instagram : @charlottewoivre

Crédit Photo –  Linda Leonard

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