« Pourquoi y aurait-il un tel écart entre les photos de mode en général et les photos de mode de femmes enceintes ? », c’est la question que se sont posées Adèle et Nathalie avant de lancer émoi émoi, la marque de vêtements tendance et élégante pour futures mamans. Rencontre avec deux entrepreneuses qui ont de la suite dans les idées…
Comment vous êtes-vous rencontrées toutes les deux ?
Nathalie – On était à HEC toutes les deux, en majeur entrepreneur ! Un jour Adèle est venue me voir à la fin d’une présentation que j’avais faite à la Chambre de Commerce et elle m’a dit qu’elle voulait absolument travailler avec moi ! (rires)
Adèle – Il faut dire que Nathalie travaillait à l’époque pour une boîte de produit vaisselle en restructuration et qui ne fonctionnait plus à cause de sa matière première qui dépendait du cours du pétrole. Le sujet n’était pas très glamour et elle est parvenue à le rendre extrêmement ludique et intéressant. Ça a été un coup de coeur professionnel ! Je me suis dit que cette fille était trop géniale. J’avais un projet en tête et il était très clair que si c’était Nathalie qui le racontait, cela ne pouvait que marcher.
C’est donc toi Adèle qui a eu l’idée d’émoi émoi ?
Adèle – Le business modèle d’émoi émoi a beaucoup changé depuis sa création. A l’origine, j’étais partie du constat qu’il y avait chaque année 800 000 femmes enceintes en France et qu’elles n’avaient certainement pas envie de parcourir des kilomètres pour trouver une mode dans l’ère du temps adaptée à cette période de leur vie. A l’époque, il y avait une manière très kitsch de montrer les femmes enceintes, surtout en France. Pourtant, la femme, même enceinte, aime toujours la mode ! Pourquoi y aurait-il un tel écart entre les photos de mode en général et les photos de mode de femmes enceintes ? Il existait beaucoup de petits créateurs mais ils peinaient à se faire connaître de ce marché de niche. Je m’étais rendue compte que le e-commerce était une super réponse aux marques qui avaient du mal à se distribuer dans le monde physique. Internet prenait tout son sens.
Nathalie – L’idée est née lors d’un brainstorming de recherche d’idées autour de la création d’entreprise auquel Adèle et moi participions. Adèle est venue avec l’idée de créer un lieu pour trouver de la mode pour maman et femme enceinte et c’est comme cela qu’émoi émoi est né : au tout début, il s’agissait donc de créer une plateforme pour mettre en relation les créateurs niches de la mode maman et les femmes enceintes. Pour les futurs mamans, on apportait le meilleur choix sur notre site, et aux créateurs une super visibilité. On a énormément travaillé sur les photos pour apporter une impulsion moderne et e-commerce à ce secteur.
Aujourd’hui émoi émoi fabrique ses propres produits et s’est élargi à toute la famille. Comment s’est opérée une telle transformation ?
Adèle – Au bout de 3 ans, on a ressenti le besoin de créer nous-même et surtout on a réalisé que l’arrivée d’un enfant est non seulement un bouleversement pour la maman mais aussi pour toute la famille ! Il chamboule le compagnon devenu père, la sœur devenue tante, la mère devenue grand-mère… Les premiers sweat-shirts qu’on a sortis étaient brodés “Maman Poule” et “Maman Cool”, pour cristalliser cette nouvelle identité bouleversante qui touche la femme qui devient mère. Par la suite, nous avons développé toute une série de vêtements et d’objets pour valoriser la maman puis la famille au sens large. Le modèle a complètement changé car nous ne sommes quasiment plus dans la distribution aujourd’hui.
Vous ne suivez pas le calendrier classique de la mode mais sortez vos collections au rythme des grands moments en famille. Pourquoi ?
Adèle – On est sorti du système fast fashion pour adopter une logique 100% libre de création. On part toujours d’un événement de la vie familiale : les grandes vacances, la fête des mères, des pères, des grands-mères… Ce sont des collections événementielles qui restent en lignes quelques semaines, parfois quelques mois.
Nathalie – On cultive le slow wear. On n’est pas dans une logique de vente ou de production d’un certain nombre de pièces. On sort des rythmes de collections classiques et nous travaillons avec de nouveaux fournisseurs qui sont capables d’être extrêmement réactifs et qui ont en tête ce modèle-là.
Vous ne faites jamais de soldes, pratique que de plus en plus de marques adoptent. C’est un acte militant ?
Adèle – On a choisi de proposer le prix juste qui correspond à la grande qualité de nos produits, ni plus ni moins. On ne veut pas faire payer au consommateur cette future solde, c’est mentir à son client !
Vous entretenez une grande complicité avec votre communauté, et ce, depuis vos débuts. Comment expliquez-vous ce lien fort entre la marque et vos clientes ?
Nathalie – On n’avait jamais été maman quand on a lancé emoi emoi. La communauté a tout de suite pris une place incroyable dans nos réflexions car on avait besoin des mamans enceintes pour nous aiguiller, nous, 24 ans, et pas encore mère !
Adèle – Cette complicité s’explique aussi par le fait que nous sommes une jeune entreprise qui se développe de façon indépendante. On ne peut pas prendre des risques inconsidérés. Quand on a décidé de sortir la marinière par exemple, on les a testé avec deux premières broderies. On a questionné notre communauté sur les réseaux sociaux pour savoir quelle broderie elle préférait. C’est un modèle très vertueux dans une logique d’échange.
Quels sont les projets d’émoi émoi pour les années à venir ?
Adèle – Nous souhaitons développer nos produits car même si nous aimons beaucoup les collab’, nous voulons aller plus loin en embauchant dans notre bureau de création pour renforcer notre savoir-faire dans le produit.
Nathalie – On a aussi envie de trouver un emplacement pour faire des événements, des ateliers, inviter des acteurs du monde de la famille… On réfléchit à un modèle hybride qui nous permettrait de faire passer une nouvelle idée de la présence physique d’une marque à l’origine digitale.
Finalement Nathalie tu es devenue maman. Comment as-tu vécu cette maternité au sein d’émoi émoi ?
Nathalie – J’ai trouvé super de passer de l’autre côté, de pouvoir enfin essayer tous les produits émoi émoi ! (rires)
Adèle – Comme je m’occupe de la partie création de produits, Nathalie est devenue d’un coup une source d’inspiration inépuisable ! Et puis c’est elle qui tranchait : chaque produit doit avoir du sens et ne pas encombrer. Maintenant Joseph a 2 ans, il essaie tous nos produits, c’est notre petit mannequin ! (rires)
Et maintenant c’est à ton tour Adèle puisque tu es enceinte !
Adèle – Oui ! Avant j’essayais les produits avec des faux ventres, à présent je peux tester sur grossesse réelle ! La future maman est sur un laps de temps très court, elle n’a pas besoin de se constituer un dressing de femme enceinte. Elle va choisir un ou deux jean, un ou deux tee-shirt… Et elle va les mettre tous les jours jusqu’à l’accouchement et même un peu après car on ne re-rentre pas tout de suite dans ses anciens vêtements ! Mon but est de lui proposer des vêtement d’excellente qualité et mode qu’elle sera fière de porter et de transmettre.
Nathalie – On voulait parer le type de consommation qu’on a toute tendance à faire quand on est enceinte à savoir : à deux-trois mois de grossesse on ne rentre plus dans rien alors on retourne dans nos marques habituelles et on prends quelques tailles au-dessus et on se retrouve à 6 mois de grossesse, beaucoup trop ronde, à investir dans des vêtements de grossesse qu’on ne va mettre que quelques semaines ! Notre claim c’est de dire d’investir peu et bien au plus tôt !
La transmission est un message qui revient beaucoup dans votre discours…
Adèle – Je suis l’aînée d’une famille de 6 enfants, Nathalie de 3. Toute cette logique de consommation et de transmission est super clef dans les familles nombreuses. J’ai grandi avec l’idée qu’une pièce achetée pour moi devait aller à ma petite sœur 9 ans après. C’est cette esprit que nous avons voulu donner à émoi émoi.
Nathalie – Les fabricants doivent s’engager pour faire de la qualité et éviter l’obsolescence programmée qui existe aussi dans le vêtement ! C’est pourquoi nous sélectionnons nos ateliers et que nous ne cherchons pas à produire absolument au plus bas prix. On connait le prix des choses, la qualité se paie !
Émoi émoi est une entreprise de femmes, de mères… Vous avez pensé à une crèche d’entreprise ?
Adèle – C’est vrai qu’on réfléchit beaucoup sur la place de la mère et de la femme en entreprise.
Nathalie – On en est au balbutiement de cette réflexion car mon fils a 2 ans, Adèle est enceinte et les autres femmes de l’entreprise ne sont pas encore mère. Mais déjà au sein de l’équipe on est beaucoup plus flex en termes de planning, de contrainte… Ce sont souvent les femmes qui restent les variables d’ajustement quand l’enfant est malade, qu’il y a un problème de nounou. Je pense qu’il faut adapter les règles de l’entreprise à cette réalité.
Alors, les Françaises sont mamans poules ou mamans cool ?
Nathalie – Les deux selon notre classement de ventes ! (rires) En revanche les papas sont clairement poules et les papis clairement cools !