Nadia Azoug est la fondatrice de Monsieur Paris : une marque de bijoux symboliques et magiques fabriqués en plein coeur du Marais. Quand on passe commande, on patiente 5 semaines que sa pièce soit fabriquée : c’est la philosophie de la maison qui fonctionne sans stock pour répondre à la demande et uniquement à la demande. Une approche particulièrement revendiquée par la fondatrice qui espère que le confinement changera la donne sur nos modèles de production actuels… Rencontre.
Monsieur Paris fête ses 10 ans, quel souvenir te revient en tête instantanément ?
J’en ai deux. Le premier remonte à l’époque où je tenais mon bar. Il faut savoir qu’avant de faire des bijoux, j’ai fait des études de socio, j’ai bossé en tant que RH puis j’ai ouvert un bar. J’étais au comptoir et j’ai rencontré un bijoutier qui venait prendre son café allongé tous les matins. On est devenu copain. Il a commencé à me parler de son métier et j’ai eu comme une révélation, c’était ce que j’avais envie de faire. J’étais déjà dans un cheminent : j’avais deux enfants de 5 et 8 ans, j’étais épuisée par le boulot au bar, ça faisait déjà 6 ans, c’était le moment pour moi. Cette rencontre a été déterminant car il m’a accompagnée dans la création de Monsieur Paris.
C’était impensable pour moi de lancer une marque sans boutique même si à l’époque on ne parlait que de e-shop !
Le deuxième souvenir, c’est lorsque j’ai trouvé la boutique où j’ai installé ma marque. C’était dans le quartier du 11ème, ancien quarter des joailliers. C’était impensable pour moi de lancer une marque sans boutique même si à l’époque on ne parlait que de e-shop ! (rires) Un jour je suis passé rue Charlot et j’ai vu un panneau « à céder », j’ai appelé le numéro dans la seconde et le mec était à 50 mètres, il venait de poser l’écriteau !
J’ai choisi de remettre l’artisanat au cœur de mon travail : mes clientes attendent 5 semaines avant de recevoir leur pièce. Il n’y a pas d’achat compulsif possible
Quand tu as lancé Monsieur Paris, c’était aussi pour renouer avec un rythme de travail plus sain. Comment y es-tu parvenue ?
J’ai suivi une intuition qui était de l’ordre de l’envie et du bon sens. J’étais dans une autre conception du travail, je renouais avec l’émotionnel, le savoir-faire, le bien fait, ce qui n’était pas si loin d’ailleurs des valeurs partagées quand je tenais mon bar. J’ai choisi de remettre l’artisanat au cœur de mon travail : mes clientes attendent 5 semaines avant de recevoir leur pièce. Il n’y a pas d’achat compulsif possible, on renoue avec un achat raisonné et raisonnable, car je n’ai pas non plus voulu proposer une marque de luxe. Ça ne me ressemblait pas.
J’avais besoin et envie de bijoux simples, discrets, facile à porter pour courir après tes gosses, ton taf, ton mec !
Comment décrirais-tu le style de tes bijoux ?
Je suis kabyle : quand tu as une fête, tu portes des kilos de bijoux ! J’avais besoin et envie de bijoux simples, discrets, facile à porter pour courir après tes gosses, ton taf, ton mec ! (rires) Je suis partie sur des petites pièces qui s’accumulent si tu le souhaites et que tu n’es pas obligée d’enlever. J’ai choisi l’or, l’argent et le vermeille, car je voulais que des bijoux qui durent et qui soient en même temps accessibles.
La symbolique est forte dans tes bijoux, pourquoi ?
Je viens d’une culture où la symbolique est très forte. Le collier Joseph avec l’œil est sorti en 2013. On m’avait mis en garde : on me disait que les gens n’allaient pas aimer, que ça faisait franc maçonnique… et c’est devenu mon best-seller ! Aujourd’hui, je continue beaucoup autour de la symbolique de la quête du sens. J’aime la magie.
Je ne veux pas que mes pièces traversent le monde en avion, tout ça pour être fabriquées par des gens payés 10 balles !
Tu revendiques une production réalisée dans le quartier du marais. C’est important pour toi de rester locale ?
C’est essentiel. Mon façonnier, mon doreur, tous les artisans qui bossent sur mes pièces sont à moins de 500 mètres de la boutique ! Quand on m’a proposé de faire mes pièces en Inde pour moi cher, j’ai pas compris : je ne veux pas que mes pièces traversent le monde en avion, tout ça pour être fabriquées par des gens payés 10 balles ! Je voulais pouvoir continuer à me regarder dans le miroir.
Si on se dit qu’il faut juste rouvrir les frontières et mettre de la tune dans la caisse, c’est triste.
Penses-tu que cette période de confinement va inviter le monde de l’entreprise à revoir sa chaîne de production ?
C’est ce que je souhaites ! Il y a 1 an, j’ai donné une interview où je parlais d’un ralentissement nécessaire de la mode. Je suis très sensible à la façon dont sont fabriquées les choses, au rythme de sortie des collections et à leur impact humain, éthique, écologique. Est-ce que le confinement aura cette résonnance ? J’espère. Si on se dit qu’il faut juste rouvrir les frontières et mettre de la tune dans la caisse, c’est triste. On parle beaucoup du rôle du consommateur qui doit moins et mieux consommer mais les marques ont un rôle à jouer. J’ai beaucoup aimé en cela la prise de parole récente de Giorgio Armani sur la folie de la mode : ça suffit de présenter les pièces d’été en hiver et surtout de ressortir tous les 2 mois 40 pièces dont 35 ressemblent à la collection précédente.
On parle beaucoup du rôle du consommateur qui doit moins et mieux consommer mais les marques ont un rôle à jouer.
Quand Monsieur Paris souffle ses bougies, il fait quel vœux ?
Une fois que t’as fait le tour du soleil, t’as envie d’en faire un autre.
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