J’ai eu la chance de le découvrir en avant-première, il sort aujourd’hui en librairie, « Carnet Chéri » (éditions Les Insolentes) est le livre illustré que j’ai dévoré comme un bonbon sucré cet été. Pendant une année, Juliette Mallet, fondatrice de Coucou Suzette (une marque d’accessoires colorés et rigolos dont je suis une immense fan), a dessiné jour après jour son quotidien : s’est construit un journal intime qui raconte avec humour les petits riens de tous les jours, ses péripéties, sa vie de famille entourée d’animaux adorés, ses passions créatives et tout ce qui la fait rire. Juliette nous a confié les coulisses de son entreprise Coucou Suzette et de ce livre (très très beau btw !) qu’elle n’imaginait pas publier un jour…
Juliette Mallet, avant d’évoquer ton livre, j’aimerais revenir sur l’aventure Coucou Suzette qui a commencé en 2016 avec… un petit téton !
C’est vrai ! J’ai fait les Arts Déco car j’ai toujours voulu faire quelque chose de créatif et d’artistique dans la vie, mais à la sortie de mes études, j’ai eu peur de ne pas trouver de travail : mon père m’a trouvé un boulot chez Universal Musique pour un été, et finalement j’y suis restée 5 ans !
J’ai monté ma marque Coucou Suzette en parallèle, sans trop m’en rendre compte : je vendais des bijoux en perles sur Etsy. Je prenais à l’époque un cours de céramique le soir et je modelais des seins en céramique émaillés. Un jour, j’ai décidé de les monter sur une bague, j’ai posté mon bijou sur Insta pour rigoler et beaucoup de personnes m’ont envoyé des messages pour me l’acheter. Je ne m’y attendais pas du tout ! Je me suis mise à produire cette bague en petite série, à la main, mais au bout d’un moment je ne parvenais plus à suivre le rythme de la demande. J’ai pensé à un objet produit en série pas forcément peint à la main : j’ai créé des pin’s seins ! Ca marchait bien, et j’ai décliné d’autres morceaux du corps féminin : la main, l’œil, plus tard la bouche…
Je suis très passionnée et travailleuse.
Je suis sans cesse en train de chercher des idées rigolotes qui vont amuser les gens. Cela vient d’une phobie de l’ennui et de l’âge adulte. J’ai envie de cultiver mon âme d’enfant.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Tu as fait un vrai saut dans le vide car tu as quitté un CDI confortable pour l’entrepreneuriat et la création artistique : te souviens-tu dans quel état d’esprit tu étais à ce moment-là ?
Juliette Mallet – Je suis quelqu’un de très prudent : je ne suis pas partie du jour au lendemain. Quand j’ai eu pas mal de ventes, j’ai commencé par prendre mon mercredi, puis un mi-temps pour m’y consacrer de plus en plus. Quand j’ai commencé à avoir de l’argent de côté, j’ai cherché un atelier car je ne voulais pas travailler toute seule de chez moi. Le jour où j’ai quitté Universal, on m’a donné la confirmation pour l’atelier ! Au tout début, j’étais sur un plateau urbain, maintenant j’ai un bureau qu’on loue dans le 6ème arrondissement de Paris avec mon équipe de 9 personnes.
Es-tu fière de cette double casquette cheffe d’entreprise et artiste ?
Juliette Mallet – Parfois je réalise que j’ai des « vrais » gens qui travaillent pour moi, qui participent beaucoup à la réussite de Coucou Suzette et ça me donne un peu le vertige.
J’ai passé une de mes collaboratrices directrice générale car j’ai besoin de cultiver mon insouciance pour créer. Être cheffe d’entreprise quand on est artiste c’est difficile.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Mais je garde une touche marketing qui m’a énormément aidée à porter mon travail.
Il y a des pièces qui ont créé le buzz, à commencer par la bague sein. Et par la suite, la chaussette femme enceinte ou encore le protège portable œil dans un clip d’Angèle !
Juliette Mallet – J’ai fait de l’illustration dans mon parcours, mais j’ai toujours été tiraillée avec le design d’objet. Et c’est vrai que j’ai eu cette chance très tôt de créer des produits qui ont fait des mini buzz ! Cela repose sur des idées un peu inédites : mes chaussettes à motifs seins ou encore kamasoutra, les femmes enceintes…
Je cherche à ce que chacune de mes créations provoque un rire d’enfant dans nos vies d’adultes.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Je me suis emparée de la pince à cheveux que j’utilisais au quotidien mais qui est un objet assez moche : j’ai commencé par ma pince œil qui a cartonné. Ce qui a changé le destin de Coucou Suzette, c’est justement cette pince œil. J’ai eu un premier revendeur en Corée qui travaille avec des gens dans la musique. Les filles du groupe Black Pink (très connu là-bas) ont fait leur shopping et l’une des filles a porté ma pince œil : encore aujourd’hui, on est sold out sur la pince grâce à cette visibilité.
Juliette Mallet – Crédit photo Coucou Suzette
Le revers de la médaille d’un tel succès, c’est que tu es sans cesse copiée. Aujourd’hui, une personne de ton équipe bosse à temps plein sur le sujet avec ton avocat…
Aujourd’hui, toute mes collections qui sortent sont copiées à 100%.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
J’ai gagné deux procès contre deux grosses marques connues pour faire du drop shipping, qui volent mes designs et même mes photos ! Mais je n’ai pas le droit de les citer. En ce moment, on essaie d’être plus agressif car c’est trop. Je suis même parfois accusée moi-même de drop shipping ! Maintenant je dépose tous mes dessins en France et en Chine. J’ai aussi récupéré mon nom dans tous les pays asiatiques, ça m’a coûté un rein : mais certains revendeurs mal intentionnés revendaient des copies de mes créations avec mon nom qu’ils avaient déposé…
Ce qui est très effrayant aujourd’hui, c’est qu’avec l’intelligence artificielle, ce ne sont même plus que des copies de mes accessoires qui sont vendues, mais des créations que j’aurais pu dessiner, en moins belles bien sûr…
Univers coloré, kitsche à souhait et une direction artistique reconnaissable entre toutes : cet univers, tu le cultives depuis longtemps ?
Juliette Mallet – C’est, très sincèrement, ce que je suis depuis toujours. Et je pense que j’ai baigné dans un univers familial qui a alimenté cela chez moi. Ma mère est illustratrice, elle dessine des motifs pour vêtements d’enfant. Mon frère est sculpteur et illustrateur. Mon père est musicien… Tous adorent les trucs qui frôlent le mauvais goût !
Je suis aussi allée vivre au Japon : à Tokyo, ils ont l’art du gadget, de l’idée rigolote, de l’univers kawaï, j’ai adoré ! Je trouve que c’est chouette de garder une âme d’enfant.
Parfois je me demande si les gens vont se lasser mais je pense qu’on a tous besoin de légèreté ! C’est la force de Coucou Suzette : cette ode à la fantaisie !
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Alors comme ça tu n’as pas envie de grandir ?
L’insouciance, la créativité, le fait de partir dans son monde imaginaire… C’est ce que j’ai de plus précieux dans la vie. J’ai besoin de ça au quotidien.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Mes objets sont comme des fausses vies : je joue à la dinette ! Et puis mes shootings de collection sont devenus des sources de créativité aussi fortes que mes créations. J’
Tes shootings Coucou Suzette rassemblent souvent des personnalités !@laura_felpin et @cedricsalaun @rodica.paleologue – @elodie.arnould – @loladubini – Grace ly, Pénélope Bagieu… Comment les sélectionnes-tu ?
Juliette Mallet – J’ai la chance d’en rencontrer pas mal avec mon métier ! Laura Felpin est mon amie d’enfance et Cédric aussi 🙂 Les autres aiment la marque ! Pour chacun de mes accessoires, j’imagine une histoire, je crée des personnages… et je cherche des comédiens pour les incarner. Souvent je les contacte sur Instagram, j’y vais au culot ! Il y a toujours un côté foisonnant et rigolo !
J’observe une volonté très inclusive chez Coucou Suzette, avec notamment des femmes plus âgées sur tes shootings : c’est important pour toi de t’adresser à toutes les générations ?
Oui, exactement !
Coucou Suzette, c’est un peu une grande fête où tout le monde est invité. Aussi bien les petites filles que les grands mères.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Pinces à cheveux Coucou Suzette
Tu es une amoureuse des animaux qui tiennent une place particulière dans ton travail, on les retrouve aussi beaucoup dans ton livre : Joya, le chien de tes parents, Suzette (qui était le nom de ton premier chaton). Ils restent une source inépuisable d’inspiration pour toi ?
Je ne peux pas t’expliquer pourquoi mais les animaux, c’est le truc le plus important de ma vie. Ce sont les relations les plus simples et les plus pures. J’essaie, avec Coucou Suzette, de leur rendre hommage.
Juliette Mallet, fondatrice de Coucou suzette
Je reverse 1% de mes bénéfices à des asso’ qui s’occupent des animaux.
Carnet Chéri est ton tout nouveau projet : ton premier livre illustré ! C’était quelque chose que tu attendais depuis longtemps ?
J’ai toujours rêvé de faire des livres ou des BD et même écrire ! Mais j’ai toujours eu le syndrome l’imposteur car mon diplôme aux Arts Déco s’est mal passé (pas mes 5 années d’études !). Je l’ai vécu comme quelque chose de dur. J’ai passé 5 ans cachée chez Universal, car ça m’a heurtée.
En commençant mon carnet chéri un été, je ne savais pas très bien ce que je voulais en faire. C’est très important de garder en tête « Je ne me prends pas la tête ». Au fil des planches, j’ai commencé à réfléchir à une publication. A partir du moment où j’ai signé avec Les Insolentes, j’ai commencé à stresser : j’étais constipée dans ma façon de faire ! (rires) Carnet Chéri est un super accomplissement pour moi.
Juliette Mallet – Crédit photo Coucou Suzette
Parle-nous de ce carnet : ce sont tes aventures illustrées. Quelle période couvre-il et qu’as-tu voulu partager ?
J’ai commencé ce carnet à l’été 2021, plus précisément le 14 juillet 2021. Le carnet se termine le 14 juillet 2022, dur de trouver une chute ! J’y ai partagé mon quotidien, les conversations que j’ai pu entendre et qui m’ont faite rire, les petits riens de tous les jours, mes péripéties familiales entourée d’animaux…
Juliette Mallet – Crédit photo Coucou Suzette
Il porte le nom de Carnet chéri : pourquoi ?
Parce que je l’ai toujours appelé comme ça ! C’est d’ailleurs le nom de la note sur mon téléphone où je consignais toutes mes idées glanées dans la journée, et c’était tellement une source de joie. Comment l’appeler autrement ? Il parle de ma vie de couple, mes angoisses, mes parents, mes animaux…
Une pépite à découvrir dès maintenant en librairie !
