F

Frédéric Agid, de la pub aux tattoos !

Son antre est cachée dans la piscine d’une ancienne maison close à deux pas de la place de Clichy. Est-ce parce qu’il n’a pas toujours été tatoueur que son atelier, cosy et baroque, ressemble à un show-room de décorateur ? Au stylo, au pinceau, au crayon ou au dermographe, sa passion reste la même : imaginer un dessin inédit qui raconte une histoire. Rencontre avec ce drôle d’oiseau de Frédéric Agid.

Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur

Comment es-tu devenu tatoueur ?

Par hasard ! En fait, je suis né avec un crayon dans la main, mais mon éducation bourgeoise a tout fait pour m’en détourner. Mes parents ne voulaient pas que je fasse les Beaux-Arts, ils craignaient que je n’aie pas un « vrai » métier par la suite. J’ai donc opté pour un compromis en passant un CAP au lycée Corvisart des arts graphiques. Pour être franc, moi-même je n’étais pas persuadé d’avoir ma place aux Beaux-Arts ou à l’école Boule, je me voyais trop comme un cancre.

 

Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur-7

 

Lorsque j’ai débuté dans la pub, au milieu des années 90’, c’était fun ! On m’avait dit à l’époque : « Plus tu t’amuses, plus tu es créatif ! », c’était une immense cour de récréation. Dix ans plus tard, tout avait changé. Au fond de moi, je suis un utopiste et j’ai toujours eu envie de participer à l’amélioration du monde dans lequel on vit, or c’est devenu clair que la pub ne soufflait plus le même esprit de liberté qu’avant. J’ai donc tout plaqué pour bosser à mon compte, comme directeur artistique pour de grosses agences (TBWA, EuroRSCG, Publicis, Ogilvy) ou d’autres moins connues, et suis devenu directeur de création à mi-temps pour me permettre de dessiner. Lors de ma première expo, j’ai compris que cela intéressait aussi d’autres gens que moi !

 

Je me suis entraîné des heures sur des oreilles de cochon. Je faisais ça dans le salon de ma mère qui habite Neuilly, tu imagines la scène ?

 

Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur-1Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur-6

 

Et c’est à ce moment-là que l’on m’a demandé de travailler à un projet de dessin pour des tatouages. Quitte à créer des modèles pour des tatoueurs, pourquoi ne pas les tatouer moi-même ? L’idée a fait son chemin et je me suis dit : « Après tout, pourquoi pas moi ? »

 

Comment devient-on tatoueur du jour au lendemain ? Tu as d’abord été assistant dans un salon de tatouage ?

Non. Je me suis beaucoup renseigné et me suis fait tatouer par différents mecs réputés dans le métier. J’ai observé leur pratique, posé des tonnes de questions pendant les séances puis me suis entraîné des heures sur des oreilles de cochon. Je faisais ça dans le salon de ma mère qui habite Neuilly, tu imagines la scène ? Bon j’ai aussi suivi une formation hygiène et salubrité obligatoire pour les salons de tattoos et de piercing.

Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur-2

Comment définirais-tu ton style ?

Je dessine uniquement au stylo bic, j’ai été très influencé par des peintres comme Egon Schiele, Oscar Kokoschka, et par l’Art brut. Mais mon style est plus naïf, plus enfantin (crush spécial pour les super héros !) que les peintres nommés précédemment et il y a chez moi quelque chose de très intuitif. Mes dessins ne sont pas académiques, je crois qu’une certaine poésie s’en dégage, et je les accompagne très souvent d’une citation. Sur instagram mes textes sont d’ailleurs toujours très longs car je veux pouvoir raconter l’histoire de mes tattoos. Mes clients aiment ma démarche et recherchent d’ailleurs souvent un autre style de dessins que ceux que l’on voit partout. Chacun de mes rendez-vous commence par un entretien où je discute beaucoup avec mon ou ma futur.e client.e afin de cerner les raisons qui le ou la poussent à se faire tatouer et quel message ils veulent transmettre. Il y a une dimension psychologique dans ce métier qui n’est pas neutre. L’œuvre créée est destinée à durer ad vitam aeternam.

 

Et tes clients, à quoi ressemblent-ils : plutôt bcbg ou hard rockers ?

A 75% ce sont des femmes, entre 28 et 35 ans, CSP +. Elles viennent souvent me voir pour un premier tatouage. Je n’ai pas que des Françaises, pas mal d’étrangères aussi. D’ailleurs, comme je garde de bons contacts avec mes clients en général, il y en a une qui revient presque tout le temps, quand elle fait escale à Paris ! On parle beaucoup, forcément ça crée des liens !

Frédéric-Agid-Tatoueur-Interview-Le-Prescripteur-8

Tu n’as ni la tête ni la dégaine d’un voyou ! Est-ce que l’on peut être un tatoueur sans avoir l’air d’un bad boy ?

La preuve ! J’en suis un. C’est vrai que je ne cadre pas avec l’image stéréotypée que l’on se fait des tatoueurs ; mais tout cela est en train de changer. En fait, je me considère avant tout comme un artiste et que je dessine pour tatouer ou pour un autre support, ma démarche est similaire.

 

En-dehors du tattoo, tu as ainsi créé des dessins pour une marque de skateboard ?

Oui, pour la marque Baise en Ville sur le thème de Paris. Chacune des dix planches est unique, conçue avec une board vintage de 1978. Elles ont été exposées en juin au Café Fluctuat Nec Mergitur, place de la République à Paris. J’ai aussi dessiné une collection capsule pour Armor Lux – 3 marinières et 2 T-shirts – qui sortira au printemps 2018. Récemment j’ai monté un petit film pour Dr Martens et je continue à créer quelques fresques. Enfin, j’ai un projet perso concernant un mini dessin animé futuriste en noir et blanc avec des épisodes de 20 à 30 secondes. Ce sera une satire de la société vue à travers… le prisme d’un tatoueur !

 

Rendez-lui une petite visite ici : https://fredericagid.com/, là http://fredericagid.tumblr.com/ ou là https://www.instagram.com/fredericagid/

0 0 votes
Évaluation de l'article
CategoriesNon classé
S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires