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La diététique chinoise ou l’art de se soigner en mangeant !

Du stylisme de mode à la diététique chinoise, Pascale Perli nous raconte son parcours et sa passion pour cette branche de la médecine traditionnelle chinoise.  Une approche multi millénaire qui allie plaisir et bien-être.

Quelques mots sur votre parcours pour commencer …

J’ai quitté mon métier de styliste de mode pour me lancer dans une reconversion professionnelle. A 40 ans, j’ai repris des études de médecine traditionnelle chinoise. J’ai été formé en acuponcture, en massage et en diététique, mon domaine de prédilection aujourd’hui.  Récemment, j’ai supervisé un livre : Le Guide familial de la médecine chinoise, les pratiques expliquées en pas à pas (Mango édition). J’ai écris la partie « Comment se soigner en mangeant » ou comment guérir tous nos petits bobos avec des recettes de cuisine,  sans passer par l’acuponcture, mais avec des techniques faciles à reproduire chez soi.

Sur Facebook, il y a  3 ans maintenant, j’ai commencé à raconter des histoires autour des recettes de mes grands-mères en donnant leurs bienfaits version médecine chinoise. Au début, c’était pour rire et puis cela tellement plu que nous avons créé avec ma fille le blog Madreperla. Deux rubriques marchent bien et sont très partagées : « Recettes qui soignent » et « Aliments qui soignent ».  

Pourquoi un tel succès ?

Les gens adorent connaître les bienfaits des aliments. Je leur donne des informations de thérapeutiques chinoises. Mais celles-ci ont été étudiées et validées scientifiquement par la médecine occidentale.  Exemple, la patate douce est parfaite pour l’immunité parce qu’elle possède des antioxydants très utiles pour la renforcer.

Quasiment tous les aliments décrits aujourd’hui comme bons pour la santé  sont des aliments que les chinois connaissent et utilisent comme médecine depuis 2500 ans. 

Pascale Perli

La science a aussi découvert que la couleur est un bon indicateur des propriétés thérapeutiques d’un aliment. Par exemple, tous les produits noirs ou violets sont selon l’énergétique chinoise,  liés à la saison de l’hiver et son organe le rein. Exemple, le sésame noir, les algues sont efficaces pour ralentir le vieillissement de la peau.

Vous parlez avec cœur et passion de votre travail sur ce blog. Comment êtes-vous tombé dans la marmite de la diététique chinoise ?

J’ai toujours adoré cuisiner.  J’ai commencé par faire 4 ans de formation en acuponcture et massage. Puis, j’ai eu la chance de rencontrer Josette Chapelet (spécialiste en diététique chinoise). Elle a été mon mentor. Après mon premier week end de formation avec elle, je n’ai pas dormi pendant une semaine tellement j’avais adoré.  Cela regroupait tout ce que j’aimais, la médecine chinoise et le fait de se faire du bien en mangeant. En tant qu’ancienne styliste de mode, j’attache une grande importance à l’esthétisme. J’adore l’idée que ce que l’on mange soit aussi bon que beau. Car  on se nourrit aussi de la beauté. Je prends le temps de choisir une jolie assiette pour que le plat soit bien présenté. On savoure déjà un plat quand l’esthétique est là. Je veux sortir des dogmes : « Il ne faut pas manger ceci ou cela, pas de gluten, pas de produits laitiers », etc.  Je suis dans une démarche de plaisir. Et comme par hasard, quand un plat est beau et savoureux, il est bon pour la santé. 

En me tournant  vers  la diététique, je m’intéresse aussi  à l’écologie, à la protection de la planète.  En médecine chinoise, plus un aliment est vivant, plus il nous donne de la vitalité.

Pascale Perli

Pouvez-vous préciser ce point ?

Tout être vivant est composé de matière et de non matière.  Nous sommes fait d’un corps physique (matière) et d’énergie appelée en chinois le Qi, ce qui nous met en mouvement. L’aliment fonctionne de la même manière. Il est composé de matière et de Qi. Il nous fait cadeau de sa forme, de sa couleur, de sa matière  et de son énergie.

Plus l’aliment est proche de la nature, plus son énergie est puissante. Par exemple, (…) un poulet élevé en batterie a moins d’énergie qu’un poulet élevé en plein air.  Cela correspond au Jing, c’est-à-dire l’essence vitale de tout être vivant.

Pascale Perli

Quand on mange une carotte, on se nourrit de l’essence vitale de la carotte. Au restaurant, les Chinois choisissent dans les aquariums le poisson qui a l’air le plus dynamique.

Pouvez-vous nous rappeler les fondamentaux de cette branche de la médecine traditionnelle chinoise ?

La diététique fait partie des arts du Tao. Chaque branche de la médecine chinoise est un art. C’est une science mais chaque personne qui la pratique le fait à sa manière. Parmi les branches de la médecine chinoise, il y a l’acuponcture, le massage Tui Na, la pharmacopée, la diététique. Celle-ci fait aussi partie de la pharmacopée, car les aliments sont des médicaments. Mais cela reste une branche à part entière, car manger c’est se soigner.  On peut aussi ajouter le Qi gong, la méditation, le Feng Shui, l’astrologie chinoise. Le principe au cœur de ces disciplines est le Yang Sheng où comment renforcer la vitalité pour conserver la  santé.

Pourquoi les Chinois se sont autant intéressés à l’alimentation depuis  5000 ans ? Parce qu’ils cherchaient l’immortalité.

Pascale Perli

Le but de la médecine chinoise est de trouver le moyen de renforcer son énergie et de ne pas tomber malade. Comment ?  En mangeant, en respirant, en se reposant, en faisant l’amour etc. Pour les Chinois, ce sont des choses très simples du quotidien qui peuvent nous empêcher de tomber malade. Depuis toujours, ils font attention à leur alimentation. 

En médecine occidentale, seule Hildegarde de Bingen au Moyen-Âge a développé une approche similaire autour des propriétés thérapeutiques des plantes et des aliments.

Pascale Perli

Quels sont vos conseils pour bien manger « à la chinoise » ?

Premier truc : si on mange de saison, on ne se trompe pas.  Les produits de l’été rafraîchissent le corps quand il fait chaud, comme la tomate, le melon, la pastèque, les courgettes.  En hiver, on mise sur les légumes racines.

La couleur est aussi un excellent repère. Chaque organe est associé à une couleur. Avant de penser nature ou saveur des aliments, pensez couleur. Comme par hasard au printemps, il y a beaucoup de vert, la couleur qui correspond au foie, l’organe de cette saison. En été, on a les fruits, les légumes rouges comme le poivron, la tomate, les cerises, les fraises. Cette couleur est  associée au  feu et au cœur, l’organe de l’été.  A l’automne, les aliments de couleur blanche sont excellents pour le poumon, l’organe de la saison. Le navet est le grand remède pour traiter la toux grasse, la poire pour traiter la toux sèche, le chou chinois pour les problèmes pulmonaires.  Les couleurs représentent la couleur vibratoire de l’organe.

Après les couleurs, parlons des 5 saveurs, la signature de la diététique chinoise, il me semble ?

Chaque aliment a une fiche d’identité comme les points d’acuponcture. Exemple : tel point fait partie de telle famille et va traiter tel organe.  Quand je donne la fiche d’identité d’un aliment, ce que je fais pour chacune des recettes publiées sur mon blog, je commence par décrire la nature des ingrédients. Les 5 natures sont : le froid, le  chaud, le neutre, le frais ou le tiède. La nature donne une indication sur l’effet thermique produit par l’aliment dans mon corps après digestion. Attention, ce n’est pas parce que cela sort du frigo que la nature de l’aliment est froide. Exemple, le thé à la menthe se boit chaud et pourtant il rafraîchit. Pourquoi ? Parce que la menthe est la seule épice qui refroidit le corps. En revanche, si on boit un verre d’alcool même avec des glaçons, l’alcool réchauffe le corps.

Ensuite on se penche sur les 5 saveurs : l’acide pour le foie et l’élément bois, le doux pour la rate et la terre, l’amer pour le feu et le cœur, le piquant pour le métal et le poumon, le salé pour le rein et l’eau.

La saveur sucrée est le poison de la saveur douce, sucré et doux ce n’est pas pareil. La rate a besoin de sucre lent mais  pas de sucre rapide. Dans la nature d’ailleurs, il y a très peu de sucre rapide naturel à part le miel  peut-être. Or on mange beaucoup trop de sucre rapide et ce n’est pas bon pour la santé.

En résumé, la nature de l’aliment nous dit ça réchauffe, ça rafraîchit le corps.  Les saveurs offrent un bienfait  thérapeutique pour chaque organe. C’est via les saveurs que l’on entre dans la partie plus médicale de l’alimentation. Précision, ce n’est pas indispensable de réunir les 5 saveurs dans un même plat. L’essentiel est de garder la variété des natures, des saveurs, des modes de cuisson tout au long d’une journée par exemple. La Chine, c’est le juste milieu. On évite les excès et de manger toujours la même chose.  Il faut manger de tout, panacher pour équilibrer ses menus.

Pour conclure, que faut-il avoir dans son placard pour composer ses menus en suivant les principes de la diététique chinoise ?

Avant de parler placard, je parlerai assiette : qu’est ce qu’il faut mettre dans son assiette pour être en bonne santé. Cela vous donnera des idées aussi pour avoir un placard idéal. 

Alors de quoi est-composée cette assiette ?  Il y a un tiers représenté par un bol de riz chinois ou de céréales, ensuite une petite portion de protéine plus petite que le bol (viande, poisson, œuf, tofu, légumineuse, fromage même s’il y en a peu dans la cuisine chinoise) et tout le reste c’est des légumes à volonté. Vous me direz ce n’est pas un scoop, n’importe quel diététicien vous donnera le même conseil. Sauf qu’en diététique chinoise, les explications sont différentes.

Revenons à la base, nous sommes des êtres vivants fait de matière et de non matière, d’un corps physique (le sang, le yin) et d’énergie (le yang). Il faut nourrir le corps, le sang et l’énergie. Les céréales nourrissent l’énergie. Si vous êtes fatigué, mangez un bol de riz. Quand on manque d’énergie, c’est  souvent que notre sang manque aussi de nutriments. Les protéines vont nourrir mon sang et mon énergie en même temps. Les légumes ne nourrissent ni l’énergie, ni le sang, mais ils nettoient le corps pour l’empêcher de tomber malade et  de grossir.

Alors pour revenir au placard idéal, je conseille d’avoir un cuit riz ou rice cooker c’est super pour avoir toujours  un bol de riz ou de céréales d’avance. D’ailleurs, la mode des Buddha Bowl est géniale, car ils sont parfaits pour réaliser un plat idéal.  Au fond de votre bol, vous mettez un peu de céréales, par-dessus on coupe un avocat, une betterave cuite. On peut ajouter un œuf au plat, une boite de sardine. On essaie de faire quelque chose de joli avec des protéines, des céréales et des légumes. L’assiette idéale peut être aussi une salade composée avec du riz,  un couscous, un bo bun. Les plats traditionnels respectent pour la plupart cette règle, qu’ils soient marocain, africains et même français. Attention, ne forcez pas trop sur les protéines. On mange trop de viande, ce n’est pas bon pour le corps et la planète.

Chez les Chinois, un blanc de poulet est suffisant pour quatre personnes. On le coupe en fines lamelles, on le fait sauter au wok et c’est parfait pour nourrir votre sang.

Pascale Perli

Donc dans votre placard, il faut avoir des céréales variées d’avance, des épices pour mettre du goût, des légumes frais et de saison, des légumineuses comme les petits pois, les pois cassés, les lentilles, les pois chiches. En fait, revenez juste à l’essentiel.

  • Retrouvez les recettes et les conseils de Pascale Peril sur son blog Blog | Madre Perla
  • Son livre : Le Guide traditionnel de la médecine chinoise, les pratiques expliquées en pas à pas, Pascale Perli, Gilles Donguy, Alain Tardit, Mango éditions, 22,90 €

Pour aller encore plus loin, notre sélection de livre :

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Marjorie
Marjorie
2 années il y a

Cet article est très intéressant puisqu’il remet les essentiels de la nutrition au coeur du sujet, avec des explications simples et évidentes que l’on a tendance à oublier. Merci !