Que se passe-t-il à l’intérieur quand il ne se passe rien dehors ? Dans les appartements, dans les maisons, dans les têtes ? C’est la drôle de question à laquelle ont répondu 6 réalisateurs de talent dans 6 X Confiné.e.s sau travers de 6 courts-métrages géniaux dont l’histoire se déroule pendant le premier confinement. A regarder comme un long film à sketchs, poilant et déroutant sur Canal +.
Loin des clichés des parents épuisés par les gosses, ou encore des célib’ en date sur Zoom, chaque court-métrage présente un huit clos à la fois décalé et témoin d’une époque. Casting de fou (Vincent Cassel, Ludivine Sagnier…), réalisateurs épatants (Alice Moitié, So Me, Marina Rollman…), on a réussi à échanger avec So Me et Alice Moitié sur leur premier court-métrage respectif : Scorpex et Jusqu’à Saint Molard.
So Me nous parle de SCORPEX
Le pitch :
Scorpex est un DJ d’une quarantaine d’années en pleine « mid-life crisis ». Il convie Félix, DJ novice et compositeur de musique électronique, à passer le confinement chez lui pour l’utiliser en tant que ghost writer. Félix débarque, accompagné de sa copine Olympia, styliste, qui ne va pas beaucoup apprécier l’ego et les manières de Scorpex.
- Ton idée de scénario est venue comment ?
Cela faisait un moment que je travaillais sur un projet de long métrage. Quand mon producteur m’a approché pour ce projet de court métrage, il m’a dit que ce seraut justement une bonne occasion de tester sur un format court le ton de mon long-métrage ! Finalement mon scénario aurait pu se passer en dehors d’un contexte de confinement, mais cet ancrage temporel a généré une contrainte de huit clos très intéressante.
Scorpex est en pleine « mid-life crisis », surtout que son job, DJ, est une occupation de « jeune » pour « les jeunes ».
- Tu es content du résultat ?
Je crois que je suis content ! (rires) Bien sûr, je sais ce que j’aurais pu faire mieux, mais je crois que c’est divertissant, que le ton fonctionne bien. Cela joue sur la gênance et le narcissime, sur la question de trouver sa place dans la société. Des thèmes assez sérieux. Scorpex est en pleine « mid-life crisis », surtout que son job, DJ, est une occupation de « jeune » pour « les jeunes ». Les problématiques soulevées par ce métier sont bien ancrées dans cette époque de représentation : la place de l’ego, une mise en scène de soi quasi permanente, le besoin de validation, et les dégâts que cela occasionne sur le psychisme.
- Pourquoi avoir pensé à Vincent Cassel pour interpréter Scorpex ?
Pour ce personnage de DJ, on pouvait envisager un comédien confirmé, et j’ai naturellement pensé à Vincent Cassel. Je lui ai fait parvenir le scénario et il m’a répondu « Je dirai bien ce texte, ça me correspond bien ! » Il se voyait incarner un personnage de comédie C’est un vrai coup de chance et c’est une belle histoire pour moi car Vincent ne fait pas des courts-métrages tous les quatre matins. On a navigué avec son emploi du temps pour trouver quatre jours de tournage. C’est un bel alignement des étoiles.
- Parle-nous des deux autres talents de ce huit-clos : Manoel Dupont (Félix) et Mara Taquin (Olympia) ?
Une fois que j’ai attribué le rôle principal à Vincent, je me suis mis à la recherche des deux autres dans le cadre d’un casting traditionnel : envoi de photos et vidéos dans un premier temps. Mara est une actrice belge et je n’ai pas hésité une seconde avec elle. Le fait qu’elle soit belge je pense n’est pas anodin : ça lui donne une fraîcheur, une sorte de naturel, un truc. Et puis les Belges se la pètent moins que les Francais ! (rires) La personne qui lui donnait la réplique, était un ami à elle, Manoel. Les garçons français que j’avais castés donnaient plus de physique, d’ingéniosité. L’interprétation de Manoel m’a complètement convaincu : je n’avais pas écrit le rôle de cette manière et ce qu’il en a fait est mieux que ce que j’avais imaginé !
Alice Moitié nous parle de JUSQU’A SAINT MOLART
Le pitch :
Mélanie, la trentaine, issue d’un milieu très modeste qu’elle a renié, est devenue une coqueluche de la mode parisienne. Durant le confinement, elle débarque avec son petit ami pour passer quelques jours chez ses parents. Elle va y apprendre par hasard avoir été victime d’un événement traumatique. Problème : elle ne s’en souvient pas du tout !
- Mais Alice, pourquoi ce titre ??
Je trouvais drôle de donner le nom d’une ville perdue que personne ne connait ! Et Saint Molart, ça m’a fait beaucoup rire !
- Ludivine Sagnier est épatante dans ce rôle de parisienne insupportable !
Je l’aime vraiment beaucoup en tant qu’actrice. Elle est touchante, drôle, elle a de la malinerie et une aura singulière. Elle respire l’intelligence. A l’écrit, son rôle n’est pas spécialement sympa, j’avais besoin d’une actrice dont on se sent proche. Et cela fonctionne toujours avec Ludivine Sagnier. J ‘étais très contente qu’elle accepte ! Et j’aime son visage, à la fois beau et drôle ! Beaucoup de mes inspiations viennent du monde de la BD, j’avais envie d’avoir des têtes cartounesques.
C’est la meilleure expérience de ma vie : j’ai eu l’impression de jouer à la poupée x12000 !
- C’est ton premier court-métrage. Comment as-tu vécu cet exercice de réalisation ?
J’ai trouvé génial de pouvoir écrire un court qui s’intègre dans une série : ce qui rendait le format très intéressant. Et puis c’est rare que les courts passent à la télé et touchent un large public ! Je suis contente d’avoir pu tourner pendant 5 jours intenses dans de bonnes conditions : ça m’a libérée que tout le monde soit bien payé, qu’on soit bien chouchouté ! J’ai adoré travailler avec des acteurs pro. J’ai jamais autant ri que sur ce tournage ! Mis à part la scène du tabac qui est lourde, je me suis mordu les lèvres pendant toutes les autres. C’est la meilleure expérience de ma vie : j’ai eu l’impression de jouer à la poupée x12000 ! En revanche, le format court-métrage est très frustant car c’est beaucoup de travail pour 20 minutes de films. Maintenant, j’ai envie d’en faire un long !
Je ne me moque pas des victimes, mais on ne pose pas la question si les victimes ont envie d’être traitées comme telles. Parfois il arrive des choses dures et cela n’influe pas dramatiquement sur la vie de quelqu’un.
- Le fond de ton scénario est super triste puisque le personnage de Ludivine apprend qu’elle a été agressée petite, même si elle ne s’en souvient pas. Etonnant d’avoir traité ce thème de cette façon !
J’ai toujours eu une fascination pour les secrets de famille ou les drames qui sortent souvent comme ça, de façon violente et sans pincette en plein milieu d’un dîner. Toutes les familles sont dysfonctionnelles et ont des histoires dont elles ne souhaitent pas parler ! Et je voulais traiter un sujet en plus : le statut de victime. C’est drôle de voir Ludivine qui s’emmerde de ne pas se souvenir de ce traumatisme d’enfance et qui arrive du coup à s’en détacher complètement. Je ne me moque pas des victimes, mais on ne pose pas la question si les victimes ont envie d’être traitées comme telles. Parfois il arrive des choses dures et cela n’influe pas dramatiquement sur la vie de quelqu’un.
- L’histoire se déroule au milieu de nul part, dans un milieu assez populaire. Pourquoi avoir planté ce décor ?
Mon histoire aurait pu se passer dans n’importe quel milieu. J’aime bien les codes et les langages de tous les milieux. Moi j’ai été un peu baladée, tout m’est familier. Mais je suis assez discrète sur ma vie, je veux juste qu’on regarde mon travail plutôt qu’on fasse de la psychologie sur mon parcours ! (rires) Dans mon court-métrage, tous les personnages sont à la fois pathétiques et touchants, c’est ce qui m’a intéressée. J’ai adoré jouer avec les couleurs dans le stylisme, le décor : on en trouve dans le bordel de certaines pièces de la maison, dans le collier du mec de Ludivine très Gen Z et à l’aise avec sa féminité… Les couleurs rajoutent de la vibration !
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