A

Albe, la sorcière électro qui célèbre la puissance des femmes

Albe, la sorcière électro qui célèbre la puissance des femmes EP Sorcières musique électro interview le prescripteur crédit photo

Un son électro et sensible sans paroles. Ou plutôt, un envoûtement sans incantation… C’est ce que nous propose Albe. Après deux EPs, « Anémones » et « Araponga », sortis en 2020 et 2021, l’artiste a dévoilé il y a quelques mois son troisième EP intitulé « Sorcières ». Musicienne et productrice, Albe nous invite à célébrer la puissance des femmes au travers d’un voyage sonore dont elle a le secret. Avec sa guitare électrique et ses machines à sons, difficile de classer l’artiste… Mais cela tombe bien, les étiquettes, elle n’en veut pas. Rencontre.

Albe, ton nouvel EP est intitulé Sorcières, est-ce directement inspiré de l’essai de Mona Chollet du même nom ?

C’est plutôt un clin d’œil au livre ! Il s’agit de mon troisième EP, et dans les précédentes sorties, je n’avais pas l’impression d’avoir parlé de moi. J’ai voulu changer cela.

Les valeurs féministes comptent beaucoup dans ma vie. En tant que femme et en tant qu’artiste, elles m’ont aidée à déconstruire les comportements sexistes et misogynes auxquels j’ai été confrontée dans le milieu de la musique.

Albe

Je trouvais que le mot « Sorcière » était très ambivalent : il fait échos aux imaginaires et ma musique est faite pour rêver, faire penser.

Tu te considères comme sorcière ?

Oui bien sûr !

Il faut être sorcière pour faire de la musique : ce choix de mener sa vie comme on l’entend, d’être seule sur scène et de défendre ses idées.

Albe

Albe est un projet solo : tu avais besoin de liberté ?

Avant j’étais guitariste, j’accompagnais des chanteurs et des chanteuses, je participais à des groupes, il y avait un côté artistique mais faire que de la guitare ne me suffisait plus. J’avais besoin de créer mon univers à part entière pour pouvoir m’exprimer. J’avais envie de contrôler ma carrière, mon environnement, mes collaborations et pour plusieurs raisons.

En tant que femme dans la musique, j’étais très sexualisée. J’ai voulu, par mon indépendance, reprendre le contrôle de mon image et choisir mes collaborateurs.

Albe

Quand on est simplement musicien, c’est une profession précaire, on dit oui à beaucoup de choses. En tant qu’artistes indépendantes, je choisis les personnes avec qui je travaille. J’ai commencé la musique à 18 ans, je n’avais pas les armes contre le sexisme que j’avais complètement intégré.

Je devais être le « quota sexy du groupe ». J’avais la sensation de ne pas être là pour les bonnes raisons, de ne pas être écoutée pour ma musique.

Albe

Les valeurs féministes m’ont beaucoup apportée en ce sens : j’ai compris que ces situations qui me mettaient mal à l’aise n’étaient pas normales.

Le mouvement #metoo a participé à mon éveil : les femmes dans la musique ont commencé à parler entre elles, à se solidariser, à créer des actions, des collaborations, pour travailler davantage ensemble et évoluer dans des environnements plus safe.

Ta musique est sans paroles, pourquoi ?

En fait, je viens du rock à la base. JQuand j’ai pris la décision de faire mon projet solo, naturellement je me suis dit que j’allais travailler le chant à la guitare, écrire des chansons. Parallèlement, j’avais commencé à faire de la musique pour le théâtre, je voyais cela comme un « à coté », et j’allais beaucoup en club où j’ai découvert la musique électronique.

A l’époque, la musique électro souffrait d’une mauvaise réputation : elle se limitait dans l’imaginaire collectif à appuyer sur des boutons. Je suis allée à des soirées queer et j’ai adoré. J’ai découvert là-bas des artistes plus axés sur le live : Irène Dresel, Chapelier Fou, Rone. Une musique qui s’écoute, sur laquelle on ne danse pas forcément, faite de jeux de textures, de boîtes à rythmes, de synthé… Le vocabulaire était très riche. J’ai découvert un nouveau langage et je me suis identifiée à ces artistes.

Au bout de quelques temps, j’ai réalisé que je n’aimais ni chanter ni écrire des textes. Aujourd’hui c’est ma manière de ressentir la musique : j’ai envie de jouer avec les textures et les mélodies.

Albe

Comment est né ce morceau SORCIERES ?

J’essaie de ne pas réfléchir quand je compose, c’est comme cela que les bonnes idées viennent. Je dois me poser, déconnecter et me laisser aller avec les instruments et me surprendre moi-même. Souvent je ne m’en rends pas compte tout de suite, j’oublie quelque jours le morceaux sur lequel j’ai travaillé, et j’y reviens. Je le regarde différemment.

Dans « Sorcières », j’ai ressenti quelque chose de très rythmé, comme des gens qui font la fête ensemble. J’ai tout de suite pensé à des femmes ensemble qui sont en célébration. Quelque chose de féminin, fort et puissant. La musique est plutôt prenante, intense, avec un gros pic sur tous les temps. Tous les percussions sont des morceaux de bois qui s’entrechoquent.

Un autre morceau de ton EP s’appelle… Fées !

La sorcière est une figure 100% positive, mais j’avais aussi envie de célébrer les fées ! Musicalement, ce morceau fait beaucoup échos à « Sorcières », mais avec une ambiance plus posée et intimiste.

Ton morceau Tabula Rasa fait référence à Buffy contre les vampires. En quoi le personnage de Willow est inspirant pour toi ?

Oui, ce morceau est un clin d’œil à la série « Buffy contre les Vampires ». Willow m’inspire car elle est l’un des premiers modèles lesbiens dans la pop culture des années 2000. Dans un épisode, elle jette un sort qui s’appelle TABULA RASA.

Albe, la culture queer est très présente dans ton projet artistique. Comment l’expliques-tu ?

La culture électro est très liée à la culture queer. Le clip de « Sorcières » raconte l’histoire de deux femmes qui se rencontrent à l’un de mes concerts. Elles ont une attirance contre laquelle elles ne peuvent pas lutter et une tension monte avec l’intensité des regards et la musique. C’est une amie réalisatrice qui m’a proposé cette histoire pour le clip : elle s’est appropriée le côté sorcière par la séduction et le charme. C’est une autre manière de voir les choses et j’aime que chaque personne puisse projeter ce qu’il souhaite sur mes morceaux…

Découvrez l’univers électro d’Albe !

0 0 votes
Évaluation de l'article
CategoriesPortraits
S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires