Pour la troisième année consécutive, Chanel a invité Le Prescripteur à découvrir l’un de ses Métiers d’Art à l’occasion du défilé annuel qui leur est consacré. Après le brodeur Lesage et le plumassier Lemarié, voici un autre brodeur, l’Atelier Montex, qui propose un savant mélange de techniques anciennes au service de réalisations d’une modernité insoupçonnée.
Nous avons eu la chance de visiter l’atelier quelques jours avant le défilé en compagnie de l’architecte de ces étonnantes constructions de broderies et de matières : Aska Yamashita, Directrice de l’Atelier Montex.
Vous avez intégré l’Atelier Montex à 19 ans ( ! ) est-ce que la broderie était une vocation ?
Plus jeune je souhaitais travailler dans la mode, et je m’étais spécialisée dans le dessin. L’opportunité s’est présentée de rejoindre l’Atelier Montex pour peindre des robes à la main dans le cadre d’une collection Chloé, dont Karl Lagerfeld était alors Directeur Artistique et Virginie Viard Directrice du Studio (elle a aujourd’hui succédé à Karl Lagerfeld chez Chanel ndlr).
La collection a plu et il y a eu beaucoup de commandes, ce qui m’a permis d’intégrer l’Atelier Montex à plus long terme, de me familiariser avec ses techniques, puis d’avoir envie d’y rester très longtemps !
Notamment grâce à une une rencontre déterminante…
Celle d’Annie Trussart, alors Directrice de l’Atelier Montex. C’était elle qui avait proposé cette idée de peinture pour Chloé ; elle faisait souffler un vent de changement sur notre façon de travailler. Sous son impulsion, l’Atelier Montex a évolué de la broderie au mètre à l’ancienne vers de nouvelles activités et relations avec les maisons de mode, grâce à un choix original de matières et de matériaux, associé à des applications innovantes mélangeant différentes techniques de broderie que nous utilisons encore aujourd’hui !
C’est Annie qui m’a demandé de rester après ma première mission, et c’est auprès d’elle que j’ai grandi dans la connaissance de l’Atelier. Nos points de vue étaient complémentaires puisqu’elle avait une approche par la broderie, tandis que la mienne se faisait par le dessin. Notre très bonne entente et de belles années de collaboration m’ont amenée à prendre sa suite en tant que Directrice de l’Atelier Montex à son départ à la retraite en 2017.
Vous travaillez avec Virginie Viard depuis des années ; néanmoins en quoi cette première collection Chanel Métiers d’Art réalisée sans Karl Lagerfeld représente-t-elle pour les ateliers un moment particulier ?
Il y a une continuité dans le travail de Virginie Viard, puisqu’elle a grandi chez Chanel et avec Karl Lagerfeld. Mais son approche et son langage sont différents pour ses collections en tant que Directrice Artistique : il y a une féminité et une douceur nouvelles dans la tonalité qu’elle leur donne. Elle est très précise dans ses demandes. A nous d’y répondre le mieux possible !
Quelle est la différence entre l’Atelier Montex et Lesage, l’autre brodeur des Métiers d’Art de Chanel ? Et est-ce qu’il vous arrive de travailler ensemble sur certains modèles ?
Lesage développe les mêmes techniques à la main que nous, la broderie à l’aiguille et celle au crochet de Lunéville. Mais la spécificité de l’Atelier Montex demeure la broderie de Cornely, réalisée également au crochet mais sur une machine où il est guidé par la main. Ce savoir-faire particulier nous permet des détournements et des mélanges de matières innovants et créatifs.
Nous n’avons encore jamais collaboré sur le même échantillon…Mais j’espère que les nouveaux locaux que nous partagerons l’année prochaine au sein du bâtiment 19M dédié aux Métiers d’Art de Chanel nous permettront ce type d’échanges et de mélanges.
A suivre dans une deuxième partie : la vidéo des savoir-faire de l’Atelier Montex et les photos du défilé !
Sortie le 6 décembre.
Quel a été le plus grand défi technique que l’Atelier Montex ait eu à relever avec vous à ce jour ?
Sans doute l’arrivée du béton pour la collection Haute Couture Printemps-Eté 2014. Un designer avait développé une résille de béton qui avait beaucoup plu à Karl Lagerfeld. Notre challenge : rendre ce béton couture ! D’abord grâce à l’ajout de motifs, comme des fleurs en strass, mais aussi de matières comme le cuir qui apportaient une brillance tranchant avec la matité du béton ; et enfin avec des effets de couleur comme un blanc dégradé effet « tweed » qui lui donnait une signature Chanel. Nous avons réussi à produire des interprétations à la fois multiples et inattendues de ce béton !
Quelle est la réalisation de l’Atelier Montex qui vous a le plus marquée dans les collections Métiers d’Art de CHANEL ?
Le collier que portait Pharrell Williams pour la collection Métiers d’Art Paris-New York en 2018 est un bon exemple d’un mélange de différentes techniques de broderie qu’on trouve chez Montex, entre la broderie main et celle sur machine Cornely. On y voit également le potentiel créatif de la Maison, nous n’avons pas peur de faire des propositions inédites de sourcing et d’investir dans des machines innovantes comme l’imprimante laser.
Comment le savoir-faire unique de la broderie Montex est-il transmis aujourd’hui ?
Nous accueillons régulièrement des stagiaires d’école de broderie, ainsi que des alternants. Il existe des lycées spécialisés en région parisienne ainsi qu’en Lorraine, et l’école de Broderie d’Art de Lunéville continue à enseigner cette technique à la fois ancestrale et régionale. Par contre, contrairement à la broderie manuelle qui « brille » très vite et où les résultats sont rapides, la broderie de Cornely est plus fastidieuse à assimiler, mais extrêmement satisfaisante une fois qu’on a franchi les premiers paliers de maîtrise de la machine. C’est une technique de passionnés, mais cela vaut le coup de s’y essayer !
A suivre sur Le Prescripteur le 6 décembre :
La vidéo backstage des savoir-faire de l’atelier Montex et le résultat sur le podium du défilé Chanel Métiers d’Art
Pour en savoir plus : http://www.mtxparis.com // Suivez Montex sur Instagram @studiomtx
Et pour en savoir plus sur le nouveau bâtiment dédié aux Métiers d’Art de Chanel : @le19m
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