Charlotte Husson ou l’art de parler positivement du cancer

Charlotte Husson a 27 ans quand elle apprend être atteinte d’un cancer à un stade très avancé. Son combat contre la maladie va durer 2 ans au prix de son insouciance mais jamais de son positivisme ! Officiellement en rémission, elle décide de partager ses astuces beauté sur son blog, Mister K, pour que ces petites choses futiles et pourtant vitales puissent aider toutes celles et ceux dont la lutte continue. Rencontre avec une sacrée battante.

Mister K est né juste après ta rémission. Quelle était ton idée première ?

A 27 ans, j’avais la vie d’une jeune femme tout à fait normale, j’avais un petit ami, j’allais commencer mon job chez Sézane. C’est à ce moment-là qu’on m’a découvert un cancer de l’ovaire à un stade très avancé. J’allais devoir être opérée, perdre toute possibilité d’avoir un jour des enfants. Cela a été un énorme choc. Je me suis battue contre la maladie, j’ai enchaîné les chimiothérapies et lorsque j’ai appris être officiellement en rémission, j’ai ressenti le besoin de réécrire l’histoire de ma vie. Mister K, c’était pour moi le moyen de parler du cancer autrement, avec humour, illustrations positives et astuces beauté, pour rester coquette et garder confiance.

Avec le cancer, j’ai pris une grosse claque dans la gueule, perdu en insouciance mais jamais en coquetterie, ni en fierté !

Comment as-tu vécu l’après-cancer ?

Avec le cancer, j’ai pris une grosse claque dans la gueule, perdu en insouciance mais jamais en coquetterie, ni en fierté ! Toute mon énergie avait été dédiée au combat contre la maladie. Quand tout s’est arrêté et qu’il a fallu reprendre une vie normale avec la crainte que cela ne recommence, j’ai eu envie de retrouver ma vie d’avant mais autrement. La mode avait moins de sens pour moi, Mister K prenait une place grandissante dans mon quotidien : j’ai écrit deux posts pour décrire mon histoire puis j’ai embrayé sur le nerf de la guerre du blog, raconter le quotidien d’une cancéreuse et proposer des solutions pour rester bien dans son corps.

Tes astuces sont nombreuses, cela t’a pris du temps de rassembler tous ces conseils ?

Il faut savoir que j’ai déclaré mon cancer juste après que ma mère sorte du sien ! Maman a eu un cancer du sein et je savais qu’elle allait perdre ses cheveux. Très vite, je me suis renseignée sur les marques de cosmétiques et les astuces à adopter pour qu’elle garde sa féminité. Tout ce travail de recherche m’a été très utile quand quelques mois plus tard, je suis tombée malade.

Quand j’ai commencé à partager mes astuces beauté, j’ai réalisé à quel point il y avait un manque d’information.

Mettre du vernis foncé, hydrater son corps… Ces conseils ne sont pas délivrés par les médecins ?

Les médecins sont là pour te soigner et c’est déjà un énorme boulot. Ils ne sont pas prescripteurs de conseils beauté qui peuvent passer pour des futilités mais qui sont si importants quand tu te bats contre la maladie ! Quand j’ai commencé à partager mes astuces beauté, j’ai réalisé à quel point il y avait un manque d’information et surtout une demande très importante venant des malades et de leurs proches. Tu ne sais pas que tu risques de perdre tes ongles si tu ne les protèges par avec des teintes de vernis foncés ! Tu ne sais pas non plus qu’il faut absolument s’hydrater car le traitement assèche terriblement la peau. Je fais gagner du temps aux personnes malades et les accompagne pour lutter contre les effets indésirables d’une chimio.

On dit souvent un malade, un cancer. Tes conseils s’adressent pourtant à tous ?

La publication de mon histoire a eu une résonnance sur Facebook car beaucoup de personnes sont touchées directement ou indirectement par le cancer et que mes conseils s’adressent au plus grand nombre. Mais chaque cancer reste évidemment unique. J’ai tout de suite prévenu que je ne voulais pas tenir le rôle d’un psychologue sur mon blog, ni rentrer dans les histoires de chacun, c’était trop lourd pour moi, j’étais simplement là pour délivrer des astuces.

Je ne pouvais pas emprunter car quand tu as eu un cancer, c’est la double-peine : les banques ne veulent plus te prêter de l’argent.

Suite au lancement de ton blog, tu as lancé 3 kits de beauté que tu vends aujourd’hui sur ton site. Raconte-nous la genèse de ce nouveau projet…

Quand j’ai vu l’engouement autour de mes conseils, j’ai très rapidement pensé à créer des kits qui comprendraient tout ce qui m’avait aidée pendant la maladie. J’ai designé moi-même 3 kits : un kit visage&corps, un kit pieds&mains, un kit cheveux&sourcils. J’ai contacté les marques que j’avais appréciées durant mon traitement et je me rappelle que le tout premier partenaire à m’avoir répondu “oui” était Merci Handy. Je ne l’oublierai jamais.

Comment as-tu financé la production de ces 3 kits ?

C’est une sacrée histoire ! Je ne pouvais pas emprunter car quand tu as eu un cancer, c’est la double-peine : les banques ne veulent plus te prêter de l’argent. Je m’étais rapprochée d’une fondation et j’avais cru comprendre qu’elle s’engageait à financer l’ensemble de ma production. On s’est très mal compris et je me suis retrouvée avec ma production lancée, 40 000€ de frais, sans un rond pour payer ! C’est là que mon copain de l’époque m’a conseillé de lancer un Kiss Kiss Bank Bank. Je n’y croyais pas et pourtant j’ai réussi à dépasser mon objectif ! ¾ des personnes qui ont participé n’étaient pas malades mais souhaitaient, par solidarité, participer au financement des Mister K Fighting Kits. Ca m’a beaucoup touchée.

Aujourd’hui tu proposes sur ton site tes kits mais aussi des sweat shirts et des bracelets avec toujours le même message « Never Give Up »…

Quand j’ai lancé mon instagram, j’ai commencé par partager des photos du petit bracelet “Never Give Up” que j’offrais aux participants du Kiss Kiss Bank Bank. Ca a été un carton. Son message est tellement universel que chaque personne peut se l’appliquer à sa propre histoire, à son quotidien, peu importe l’épreuve qu’il traverse. J’ai ensuite décidé de lancer les sweat shirts après avoir posté une photo d’un de mes sweats Uniqlo que j’avais fait sérigraphier sur un coup de tête à un atelier chez Colette. Le post a eu un tel écho que je me suis lancée.

De nombreuses marques de soins pour venir en aide aux femmes atteintes du cancer voient le jour, comme MÊME Cosmétiques. De quel oeil vois-tu l’arrivée de ces nouveaux acteurs ?

Il se trouve que je suis très amie avec les fondatrices de MÊME Cosmétiques. On s’est rencontrées quand je commençais à réfléchir aux kits, elles m’avaient écrit sur Facebook. On s’est adorées car elles avaient vraiment la même vision du cancer que moi : il fallait en parler de façon positive, sans images glauques et sordides qui donnent envie d’une seule chose, se pendre !

Comment vois-tu le futur de Mister K ?

Au bout d’1,5 ans d’existence, je conjugue un blog et un e-shop où l’on trouve mes 3 Mister K Fighting Kit, mes sweats shirts et mes bracelets. Je suis dans une phase de structuration. Je suis à la recherche d’un associé ! A la base, je suis directrice artistique, j’ai de l’instinct mais pas de vision ! Il me faudrait quelqu’un qui sache construire et structurer ce que j’ai bidouillé ! (rires) Et j’aimerais aussi désincarner un peu plus le blog. C’est lourd pour moi de parler en mon nom du cancer. Je souhaite que mon blog ne soit plus rattaché à ma propre histoire mais devienne une plateforme porteuse d’espoir où des malades et des personnes en rémission échangent et s’auto-conseillent sur leurs expériences.

Directement touchées ou en accompagnement d’un proche, Mister K apporte beaucoup de conseils, on vous invite à y faire un tour…

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