Laura Domenge, humoriste qu’on adore et dont on vous parlait déjà sur Le Prescripteur, a dévoilé il y a quelques mois sa grossesse. Mais voilà : Laura ne voulait pas d’enfant et le hasard de la vie en a décidé autrement ! Très vite confrontée à un paquet de questions, cette créative hyperactive s’est lancée dans l’écriture d’un spectacle flash : en 4 semaines, le show était prêt. Elle y évoque sa grossesse « gériatrique », le triplage de volume de ses parois nasales, les accrochages avec sa gynéco’ sur sa prise de poids, ses questionnements profonds sur la transmission de sa judéité, son envie d’être père plutôt que d’être mère… Il passe ce lundi 13 mai sur la chaîne TEVA : vous avez donc votre programme de la soirée !
Laura Domenge – Tu as écrit ce spectacle « Bonne Mère » en quelques semaines seulement, et tu ne comptes pas le jouer après ton accouchement ! Il passe sur TEVA le lundi 13 mai à 21h ! C’est donc une œuvre éphémère ?
C’est le spectacle le moins rentable du monde ! (rires)
Dès que j’ai su que j’étais enceinte, j’ai tout de suite voulu écrire sur le sujet, mais je me le suis interdit au début : je me disais qu’il fallait que j’arrête de vouloir tout rentabiliser tout le temps.
En janvier, j’ai dû annoncer ma grossesse sur les réseaux sociaux car il fallait annuler des dates de tournées prévues pendant mon congé maternité. Pour ne pas que les gens s’inquiètent et se disent que j’arrête le métier, j’ai dévoilé ma grossesse.
Et puis un jour, j’étais en Suisse en tournée, et j’ai écrit 10 minutes de blague sur mon annonce de grossesse : en un premier jet, tout est passé, là où il me faut normalement 1 mois et demi de rodage. J’ai senti qu’il fallait que j’aille au bout de ce projet : j’en ai parlé à mon mec, à ma manageuse et à mon binôme de travail : on a foncé.
Laura Domenge – Crédit Photo Léa Rouaud
As-tu trouvé bénéfique cette contrainte de temps dans l’écriture ?
Bénéfique, oui et non ! C’est mieux d’avoir plus de temps pour roder : je suis quelqu’un de la scène et moins de l’écriture. J’aurais bien aimé avoir une vingtaine de dates de rodage.
Tu confies dès le début de ton spectacle que la maternité n’a jamais été un souhait pour toi. Comment as-tu vécu la découverte de ta grossesse ?
Quand j’ai découvert que j’étais enceinte, j’ai été saoulée d’être prise à mon propre jeu : mon mec désirait un enfant, de mon côté je n’en voulais pas et j’étais aussi persuadée que cela ne marcherait pas car j’ai un SOPK. Pour avoir la paix et clore le sujet, je lui ai dit : et bien vas-y, on essaie. Et puis… ça a marché.
Dans ton spectacle « Bonne mère », une phrase revient beaucoup : « La médecine, elle est méchante avec les femmes, elle est méchante ! ». C’est ce qui t’a frappée dès le début de ta grossesse ?
Une grossesse ce n’est pas qu’un « heureux événement » : il y a surtout beaucoup de bouleversements (mes cloisons nasales ont triplé de volume !) et de sujets d’angoisses qui sont peu pris en charge aujourd’hui. C’est d’ailleurs de ces sujets d’angoisses que j’avais envie de parler principalement dans mon spectacle.
Laura Domenge – Crédit Photo Léa Rouaud
Tu abordes plusieurs angoisses dans ton spectacle, la première étant ta perte de liberté. Pourquoi ?
Je questionne surtout la parentalité d’aujourd’hui. Dans mon couple, les rôles sont assez inversés, mon mec se reconnait parfaitement dans le rôle de mère. Moi plutôt dans celui du père, que je perçois comme une figure plus libre et moins présente !
J’ai toujours trouvé le rôle de mère ingrat. On se donne entièrement à un être : si on a bien réussi son éducation, on en aura rien à foutre de notre gueule.
Je trouvais ça bête de faire des enfants car j’aime ma liberté et ma vie ! Je ne voulais pas avoir d’attache. C’est ma grosse crainte avec la naissance d’un enfant. Je suis carriériste aussi : j’aime travailler, c’est ce qui m’épanouit plus que tout le reste (couple, potes…). Mon métier, c’est ma passion. Et très objectivement, une grossesse ralentit, décentre.
Cette image du père libre et absent, tu racontes qu’elle vient de ton histoire personnelle. Comment décrirais-tu ton propre père ?
J’adore mon père, alors qu’il coche toutes les cases du côté ultra patriarcal ! Je suis, a contrario, très dure avec ma mère qui m’a élevée, alors que c’est une personne extraordinaire ! Mais je le reconnais, et le raconte d’ailleurs dans mon spectacle.
Mon père était infidèle, son comportement était bien trop énorme pour ne pas en faire des blagues : c’est une histoire que j’ai aujourd’hui digérée, c’est pour cela que j’arrive à en parler sur scène.
Laura Domenge – Crédit Photo Léa Rouaud
La transmission est un thème fondamental de ce spectacle éphémère et tu évoques notamment ta judéité que tu transmettras, en tant que femme juive, à ton enfant. Pourquoi la considères-tu comme un « fardeau » (sic !) légué à ton bébé ?
Le stand up ne fonctionne que si on est honnête sur scène et c’est ma crainte en tant que mère, de donner la vie et de transmettre cette judéité. Cela me fait peur, ça fait aussi peur d’en parler de façon transparente. J’ai reçu tellement de menaces et de messages antisémites après le 7 octobre, juste parce que j’avais dit que j’étais pour la paix et que je déplorais les victimes des deux cotés… C’est flippant.
Une gynécologue m’a dit d’ailleurs que lorsqu’elle m’a vue évoquer ma judéité dans mon spectacle, elle s’est dit : « Elle se met en danger ». Ce qu’il se passe aujourd’hui est grave.
Laura Domenge – Tu conclues ton spectacle en déclarant vouloir devenir… papa ! Que penses-tu du rôle de mère aujourd’hui, à quelques jours de donner naissance ?
Je n’ai pas trop changé d’idée depuis le début de ma grossesse.
Mon mec fait partie de ces hommes là : il a des convictions fortes sur la parentalité, avec un grand désir d’enfants. Je ne souhaitais pas avoir un bébé, mais aujourd’hui j’ai envie de faire famille avec lui.