Chaque année, Le Prescripteur vous donne rendez-vous pour une lecture coquine à dévorer sous le parasol, sous vos draps ou à l’abri d’un arbre. Cette année, Fabien Muller revient avec une nouvelle érotique… de science fiction !! 5 chapitres en tout révélés un par un chaque samedi du mois d’août. Découvrez aujourd’hui le chapitre 4...
Pour celles qui auraient manqué les premiers chapitres…
Chapitre 4
Illustration @hilairebaud
Luc ouvrit les yeux. Il était allongé, ses deux bras entourant Lune, elle-même toujours assoupie. Il tenta un mouvement pour se dégager, mais elle se blottit contre lui en poussant un petit grognement satisfait.
Imperceptiblement, elle se mit à remuer les fesses, sortant petit à petit Luc de sa léthargie.
Elle continua ainsi quelques secondes tandis que le sexe de Luc était devenu aussi dur qu’une barre de fer. Il descendit son bras de gauche le long de son flanc et glissa sa main sous les fesses de Lune, entre ses cuisses, ce qui lui permit de constater même à travers la dentelle que celle-ci était trempée. Il écarta alors délicatement la fine culotte et vint frotter son sexe contre ses lèvres humides. Une fois que son gland fut lui-même totalement trempé, il s’introduit en elle, lui arrachant un nouveau grognement, un peu plus fort celui-ci. Il la pénétra alors tout en douceur par de lents va-et-vient. Lune se mit, elle aussi, à aller d’arrière en avant, afin de s’empaler de plus en plus profondément sur le sexe énorme de son amant. Luc sentit la sève monter de plus en plus tandis que Lune se mit à pousser de petits cris de plus en plus fort. Elle lui attrapa alors violement les fesses de ses deux mains, invitant Luc à aller encore plus profondément et à se répandre en elle jusqu’à la dernière goutte.
***
Luc se trouvait devant un imposant bâtiment d’une austérité mesurée et entièrement vitrée. De l’extérieur, celui-ci semblait abandonné malgré sa propreté éclatante.
C’était la première fois qu’il venait au centre du savoir, bien que l’idée l’eût plusieurs fois frôlé depuis quelques mois, depuis qu’il s’intéressait au monde.
Il s’approcha de ce qu’il identifia comme l’entrée principale et l’immense vitre s’ouvrit en un chuintement discret. Le sol se mit en mouvement et l’aspira littéralement sans qu’il n’ait aucun mouvement à effectuer. « On ne recule devant rien pour pousser les citoyens vers la connaissance », se dit Luc en souriant.
A l’intérieur, il était seul. Aucun autre humain ne se trouvait dans le centre. « Ça ne marche pas tant que ça », continua-t-il pour lui-même.
Il le savait pourtant, que les gens ne s’intéressaient plus beaucoup au savoir. Lune n’était pas seule à être amusée, parfois même irritée, par l’attitude de son compagnon. Il ne comptait plus le nombre de fois où Pierre, son meilleur ami, lui avait demandé « Mais que cherches-tu, enfin ? ». Comme si l’information pouvait tuer le bonheur apparent que chacun tentait de partager avec le reste de l’humanité.
Un hologramme apparut subitement devant lui. Une jolie blonde aux cheveux longs s’adressa directement à lui.
– Que pouvons-nous faire pour vous satisfaire aujourd’hui ?
Un menu avec différentes boissons apparut au niveau du système de vision intégré de Luc.
– Bonjour, je souhaite faire des recherches…
– Oh, répondit la jeune femme tout en mimant de manière ostentatoire la surprise.
L’image de la jeune femme fut remplacée par celle d’un homme jeune à l’air sévère et aux cheveux gris. L’image resta figée un quart de seconde puis reprit :
– Quelle section ?
Ainsi donc, la femme proposait les boissons mais dès lors que les choses sérieuses commençaient, l’homme sage reprenait la main. Une fois la surprise passée, Luc répondit à l’hologramme :
– Je ne sais pas vraiment. Je cherche des informations sur les systèmes d’écriture. Les applications d’apprentissage principalement.
Il égrena les différentes informations de son propre système d’exploitation et les caractéristiques de l’application qu’il avait téléchargée. La représentation d’un jeune homme sévère l’invita à prendre un ascenseur transparent qui venait d’apparaître derrière lui.
Une fois installé dans une pièce aveugle et à la blancheur chirurgicale, Luc était devant un écran holographique sur lequel des dizaines de menus lui faisaient face. Il commença à évoquer les questions qui lui passaient par la tête et l’écran lui fournissaient une foultitude d’informations sous différents formats. Les résumés étaient directement envoyés à ses connexions neurales. Il tomba assez rapidement sur l’information qu’il recherchait, le système de navigation étant particulièrement efficace.
« … chaque individu instancie de manière particulière et différenciée les programmes d’apprentissage de l’écriture et bien qu’elle soit encapsulée de manière automatique dans la mémoire procédurale, la mise en application montre une grande variété de graphies, chacune étant unique dans ce qu’elle révèle des micro-mécanismes de tous les muscles impliqués dans le processus global d’écriture… »
Luc releva les épaules, s’étira les bras et fit reposer ses lombaires contre le bas du siège ergonomique sur lequel il se trouvait.
Ainsi donc, c’était lui qui était censé avoir écrit ce qu’il avait lu dans le carnet.
Luc n’arrivait pas à se concentrer sur cette idée, les implications de celle-ci semblant trop importantes. Il secoua la tête et profita d’être ici pour chercher d’autres informations.
Il émit vocalement le souhait d’avoir accès à des informations sur la réparation des androïdes. On lui demanda de préciser le modèle ou la génération. Ne sachant pas trop par où commencer, Luc demanda des informations génériques.
Au bout de plusieurs dizaines de minutes, il apparut assez évident à Luc que la raison pour laquelle il ne voyait que des androïdes en parfait état était qu’ils étaient pourvus d’une puce comme les humains et que celle-ci était directement reliée à leur fabricant. Ainsi donc, au moindre incident, les androïdes étaient récupérés pour réparation ou mise à jour. Il ne pouvait donc pas y avoir d’androïde en mauvais état. Le mystère de ce qu’il avait vu demeurait entier.
Luc ne comprenait pas comment celui qu’il avait croisé pouvait être abîmé. Ils étaient censés être monitorés et donc réparés si nécessaire.
En pensant à ce défaut apparent, il repensa à Anthony… ou plutôt à sa version plus âgée. Lui aussi avait été blessé. Il essaya de se remémorer l’espèce de cicatrice qu’il avait sur le visage. Comment était-ce possible de ne pas avoir été pris en charge et de ne pas subir une greffe si cela s’était avéré nécessaire ?
Les humains étaient pucés à la naissance. Il était impossible d’échapper au contrôle médical et c’était bien ainsi. C’est ce qui permettait à chacun d’assurer sa survie pour plusieurs siècles
– Recherche sur système de puçage humain.
Luc avait parlé à voix haute, sans réfléchir, ou plutôt comme une résultante de ses réflexions. C’était sorti tout seul. Une instruction à la machine. Pourtant, l’écran holographique ne répondit rien. Il restait bloqué sur la recherche précédente concernant les androïdes.
Mince, se dit Luc. Il avait l’impression que le système était bloqué.
– Sortie, dit-il simplement.
L’écran disparut. Derrière lui, se tenait un robot que Luc n’avait pas entendu arriver. C’était un modèle qu’il n’avait jamais vu avec une sorte d’uniforme officiel qu’il ne reconnaissait pas.
– Veuillez me suivre, énonça une voix métallique qui paraissait venir de derrière le robot.
Luc ne discuta pas et le suivit.
Ils atterrirent dans une pièce jouxtant celle où ils se trouvaient deux minutes auparavant.
– Veuillez vous asseoir, énonça la même voix.
C’était définitivement troublant car la voix ne semblait pas venir du robot mais des murs ou du plafond. Luc s’assit cependant et tenta de garder son calme.
– Je suis désolé… le système s’est bloqué tout seul, je n’ai rien fait, se défendit Luc, assez peu sûr de ce qui lui était reproché (s’il lui était seulement reproché quelque chose).
Un holo-écran apparut devant le robot, Luc ne pouvait pas voir ce qui s’affichait dessus.
– Veuillez décliner votre identité, continua la voix.
Tout cela était étrangement protocolaire. Le robot n’avait bien entendu pas besoin de demander pour avoir accès à l’identité de Luc, il lui suffisait de scanner sa puce. Peut-être n’était-ce pas un robot officiel ? Tout cela était de moins en moins rassurant et Luc choisit de décliner sagement son identité.
– Quel est l’objet exact de votre recherche ?
C’était donc sa recherche le problème… Le robot suivait apparemment un arbre de décisions, les prochaines questions dépendaient donc des réponses de Luc.
Il choisit de mentir afin de s’en sortir le plus rapidement possible, car il n’avait aucune envie d’évoquer les quartiers bas avec ce tas de ferraille impersonnel.Je m’interrogeais sur l’écriture.
Pourquoi cherchez-vous des informations sur le système de puçage humain ?
Eh bien, j’ai lu un livre qui…
Je ne vois aucun emprunt ou achat d’objet physique de lecture dans les douze derniers mois.
C’est un livre qui est chez moi…
– Il n’apparaît pas dans votre dotation que vous soyez en possession d’objet physique de lecture.
Luc arrêta de parler, légèrement interdit. Le robot avait accédé à ses informations sans lui demander la permission ni le prévenir. Il n’était pas juriste mais cela lui semblait en violation directe des lois sur l’accès aux données personnelles.
– On me l’a prêté… répondit-il finalement d’une voix hésitante.
Luc s’injecta une dose de calmant afin d’avoir l’air plus naturel.
– Pourquoi vous êtes-vous injecté du X-24eldol ?
« Eh merde, ces cons sont en train de me scanner », se dit Luc en serrant les poings. Il reprit la discussion :Parce que vous me stressez…
– Quel est le titre du livre ?
Luc fit mine de chercher le nom du livre tout en réfléchissant à toute allure. S’il donnait un nom de livre connu, il pourrait savoir immédiatement si le thème du livre était en rapport avec cette discussion. Son seul choix était d’inventer un nom de livre.
– L’inconvenance du désastre.
Luc n’avait aucune idée d’où venait ce titre. Cela lui était venu ainsi. Une inspiration subite.
– Titre inconnu. Recommencez.
– C’est le titre du livre pourtant.
– Titre inconnu. Recommencez.
Le robot était coincé dans une boucle, la réponse de Luc ne semblant pas prévue dans le protocole.
Pourquoi Luc avait-il parlé d’un livre, à la base ? Il se le demanda quelques instants, sachant qu’il avait improvisé et que cette forme de stockage avait quasiment disparu depuis bien longtemps. Seuls les collectionneurs, les personnes âgées et les fanatiques anti-évolution en avaient encore et Luc n’avait pas le profil d’un collectionneur. Cependant, cela lui parut assez farfelu pour fonctionner. Le plus étonnant était qu’il avait récemment consulté plusieurs livres notamment dans ses pérégrinations dans les quartiers bas en plein jour. Il avait détecté plusieurs reproductions de bibliothèques où les livres étaient en libre-service. Il s’était même amusé à les découvrir avec son programme automatisé à une vitesse de lecture humaine sans assistance.
« De nos jours, continua-t-il à se dire tandis que le robot ne produisait désormais plus aucun son, toute l’information semble prédigérée avant d’être restituée. Tout est contrôlé. Même les moments de liberté semblent fabriqués ».
Subitement, le robot reprit sur une nouvelle série de questions :Quel est le rapport entre ce livre et le système de puçage ?
…
Veuillez répondre à la question, s’il vous plaît.
– Eh bien… le protagoniste décrit une scène de… une scène de sexe avec un androïde mutilé. Je voulais savoir si… si cela était possible.
Luc se mordit la lèvre en pensant à ce qu’il venait de dire.
L’écran disparut et le robot se positionna devant Luc.
– Par décret n°128-7 et en application du code du sexe de la loi organique #45-2, il est strictement interdit de détériorer tout objet ou élément non-organique dans l’optique d’en faire un usage récréatif…
Le robot continuait à lister des articles de loi que Luc pouvait avoir potentiellement violer. Celui-ci comprit qu’il était en train de subir un rappel à la loi. Il espérait que tout ceci serait sans conséquence lorsque le robot arrêta de parler.
– Merci pour votre temps, conclut-il avant de reculer pour disparaître dans un couloir adjacent.
Luc reprit l’ascenseur en descente puis sortit du centre du savoir sans se retourner. Le cerveau en ébullition.
*
De retour dans la pièce secrète, Luc se tenait devant le carnet noir. Le stylo reposait sur le côté, immobile, tentant.
Luc faisait une pause après avoir noirci de ses propres mains quelques lignes. Cependant, il s’était arrêté rapidement car plus il écrivait sur des zones vierges d’encre et plus il se rendait à l’évidence : c’était son écriture qui recouvrait les pages du début.
Désormais le doute et le questionnement le rongeaient littéralement. Comment pouvait-il avoir écrit quelque chose et ne pas s’en rappeler ?
Il tenta de refaire la chronologie des événements et les écrivit sur une nouvelle page.
Il se souvenait avoir acheté ce carnet lors d’une visite dans le sud de la France il y a deux ans de cela, tandis qu’il voyageait seul. Lune était partie à l’autre bout du monde avec Eléonore, sa meilleure amie et que Luc avait tant de mal à supporter. Il était parti sur un coup de tête car il tournait en rond, tout seul dans son logement vide à les imaginer toutes les deux s’amuser – peut-être à ses dépens, qui sait ?
Il était incapable de se rappeler la raison initiale qui l’avait dirigé vers cet achat particulier mais une fois acquis, il comprit que c’était la chose à faire. Il se sentait si seul dans sa quête de sens que l’idée de stocker des informations sans que personne ne puisse y avoir accès était assurément la meilleure des décisions. C’était tout à fait approprié. L’idée de mettre le carnet dans la pièce aveugle était alors venue naturellement. Il n’en avait jamais parlé à Lune. C’était étrange mais il sentait que c’était quelque chose qu’il devait garder pour lui et qu’il ne devait en parler sous aucun prétexte. Cette certitude était de l’ordre de l’intuition.
A cet instant précis, il écrivit « Pourquoi ?! ». Il souligna le mot plusieurs fois.
Peu après, il avait eu l’idée de télécharger cette application d’écriture. Cela il s’en souvenait parfaitement.
Ensuite, il ne parvenait pas à se remémorer quoi que ce soit en lien avec toute cette histoire. Plusieurs fois, l’idée lui était venue de noter quelques informations dans son carnet, mais il n’avait jamais franchi le pas.
Il n’avait donc aucun souvenir avoir jamais écrit quoi que ce soit.
Et pourtant, c’était bien lui. Toutes les preuves étaient là. Impossibles à accepter.
Il reposa le stylo.
L’explication la plus plausible était qu’il avait consommé une drogue ou qu’on lui en avait administré sans qu’il s’en rende compte. Il consulta son système interne qui confirma que rien de tel n’était jamais arrivé. Exceptés les écarts de sa jeunesse, Luc avait un comportement exemplaire à ce niveau-là. Son bilan sanguin était sans accroc.
Etait-ce alors plutôt lié au fait d’être dans la pièce « aveugle » ? Elle n’enregistrait rien, néanmoins elle n’était pas censée détruire des souvenirs ou effacer partiellement la mémoire. Il fit un scan rapide via sa puce de sa présence dans la maison « hors enregistrement » et constata plusieurs trous. Il savait que des problèmes de stockage concernant la localisation pouvaient apparaître, cependant ces ellipses temporelles apparaissaient systématiquement lorsqu’il arrivait à proximité de cette pièce. Il y avait donc été plusieurs fois il y a un an et demi mais il n’en avait aucun souvenir.
Le mystère s’épaississait et son envie de comprendre décuplait avec l’incompréhension.
Avait-il lui-même effacé volontairement une partie de sa mémoire ? C’était possible mais cela semblait peu probable. Pourquoi aurait-il fait cela ? Avait-il découvert quelque chose qui remettait en cause l’équilibre de sa vie ? Ou pire ?
Trop de questions. Pas assez de réponses.
Il était clair cependant que la clef se trouvait probablement dans cet objet qui avait traversé les âges.
Il ne lui restait plus qu’à l’accepter et à se plonger dans ses propres notes oubliées afin d’élucider cette énigme.
Le mieux était sans doute de commencer par le plan. Il le regarda et tenta de s’en rappeler sans prendre aucune photo mémorielle, simplement avec ses capacités naturelles.
En effet, s’il mémorisait la carte sur sa puce, n’importe qui – un officiel, une autorité quelconque – pourrait y accéder. C’était une chose de se faire prendre en train de faire un plan à trois avec un morphe, mais ça, c’était autre chose, il en avait l’intime conviction. Il sentait quelque chose, une sensation sur laquelle il n’arrivait pas à mettre de mots. Son instinct lui ordonnait d’être prudent. Etait-ce cela le sentiment d’être en danger ?
Il s’interrompit subitement et ferma le carnet lorsqu’il entendit un bruit dans l’entrée. Lune venait de rentrer.